mardi 28 octobre 2014

"Hooligans contre Salafistes"



Dimanche 26 octobre 2014, du côté de la place de Breslau et de la gare centrale de Cologne (*) : une foule de quelque 3000 personnes (**), composée de néo-nazis, de hooligans adeptes de la violence dans les stades de football et de rockers, qui en Allemagne sont connus pour se financer en "bandes organisées" avec les recettes de la prostitution, du racket et du deal, est venue - sous prétexte de manifester contre le soi-disant "État Islamique" - affronter la police, surprise par le nombre et la violence de la foule ayant suivi l'appel du groupe "Hooligans contre Salafistes" (HoGeSa). Surprises, les forces de l'ordre ont surtout été débordées. Résultat : 44 fonctionnaires blessés, selon le protocole de la police.



Comme les forces de l'ordre, la petite contre-manifestation sur le parvis de la cathédrale - sous le mot d'ordre "Côte à côte contre le racisme et le fondamentalisme" - n'avait aucune chance contre ce déferlement de brutes alcoolisées - "Brutalos" - prêtes à tout casser. Après un concert du groupe d'extrême-droite Kategorie C - "Aujourd'hui ils abattent des moutons et des bœufs, demain peut-être des enfants chrétiens" - il y eut quelques discours où l'on pouvait entendre : "La scène des hools est limitée, mais nous avons l'intention de devenir un mouvement populaire". - "Nous ne voulons pas être un mouvement citoyen, mais un mouvement radical à l'échelle européenne. Les autres ont eu leur chance ces 50 dernières années." - Et la foule scande : "L'Allemagne aux Allemands !" - "Étrangers dehors !" - Tandis que l'on apporte sans cesse de nouvelles caisses de bière depuis la gare pour abreuver un public en transes.



Que ce genre de manifestation puisse avoir lieu en Allemagne, après ce qui s'est passé dans ce pays entre 1933 et 1945, où actuellement on fait tout son possible pour calmer les esprits et combattre le radicalisme : cela devrait être un signal d'alarme pour les autres pays européens, et notamment la France. Car c'est une chose d'aller vitupérer depuis son siège confortable de médiatique ou d'anonyme contre l'évolution présumée néfaste de nos sociétés, mais c'en est une autre, radicalement différente, d'affronter sur le terrain les têtes brûlées d'un camp ou de l'autre. En effet, si cette "guerre des civilisations" - ardemment souhaitée par les jeteurs d'huile sur le feu et les bourreurs de mou - avait réellement lieu, il n'y aurait alors - comme toujours - qu'un seul vainqueur : la barbarie !

Soit dit en passant : ces "hooligans" - évidemment téléguidés par certaines "éminences grises" qui se dévoileront tôt ou tard, s'ils ne l'ont pas déjà fait - jouent exactement le jeu que veulent leur faire jouer les "salafistes" - eux aussi manipulés par des marionnettistes extrêmement puissants - en déstabilisant un peu plus nos sociétés occidentales, déjà minées par ce qui s'appelle la "crise" : cet euphémisme particulièrement indécent puisqu'il est utilisé de préférence par ceux qui la pérennisent pour en profiter sans vergogne. - Il faut se rendre à l'évidence que nos démocraties sont en danger : attaquées par une économie "globalisée" qui contourne allègrement les règles fondamentales de l'État social, en évitant de payer les taxes et impôts indispensables au bon fonctionnement de celui-ci et en "délocalisant" à bâtons rompus, on constate à présent - comme une conséquence logique de la paupérisation et de l'impuissance des politiques - une résurgence des extrêmes les plus archaïques face auxquels on peut se demander - et je pense encore aux années 1933/45 en Allemagne - si toute civilisation ne comporte pas, comme sa part d'ombre, une barbarie sous-jacente qui ne demande qu'à se déchaîner.

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(*) Traduites par mes soins, les informations données ici sont extraites des articles du Spiegel, datés de > dimanche 26/10/2014 et de > lundi 27/10/2014.

Le quotidien régional Kölner Stadt-Anzeiger a mis en ligne > une courte vidéo. - Ambiances filmées également > ici et > . - Enfin le lien sur > le reportage d'euronews en français, qui donne d'autres chiffres que le Spiegel.

(**) Aujourd'hui, 28 octobre 2014, la Süddeutsche Zeitung parle de "presque 5000 manifestants en partie d'extrême-droite" et de "49 policiers blessés lors des affrontements". Une nouvelle manifestation est annoncée pour le 9 novembre près du Reichstag à Berlin, à l'occasion du 25e anniversaire de la chute du mur. Le ministre fédéral de l'Intérieur, Thomas de Maizière (CDU), réfléchit aux moyens dont l'État dispose pour empêcher ce genre de rassemblements : "Cela n'a rien à voir avec la liberté de manifester et devrait par conséquent être interdit", a-t-il déclaré.




Commentaires



je suis d'accord avec vous.....ET PESSIMISTE AUSSI!

écrit par olivier
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sous ce commentaire d'olivier, j'insère celui de hub41 - salut à vous deux, sk
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cher sk : sans être cassandre, on peut craindre que ces exactions de "pitbulls professionnels" préfigurent hélas des affrontements plus larges dans nos contrées, exacerbés par la sensation d'échec et le fatalisme du "no future" avec, à la clé, la recherche de l'âne bâté, l' "autre", basané, responsable de tous nos maux..
Quand on oublie l'Histoire, on est condamné à la revivre..

écrit par hub41

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Écrit par : olivier / hub41 | 28 octobre 2014 |




Rappeler les événement des années trente est paraît-il très mal vu. Parler de collusion de fait entre les extrémistes identitaires qui ne rêvent que d'en découdre et les djihadistes aussi.
Pour un certain temps cela fait le jeu des puissances financières : pendant qu'on se bat au bas de l'échelle sociale, on ne les ennuie pas trop.
Et quand le désastre arrivera, ce sera le sauf qui peut mais les plus doués tireront leur épingle du jeu.

Écrit par : Benoît | 28 octobre 2014 |




Sérieusement, je pense réellement qu'il faut éviter les références de part et d'autre aux années 30 en Allemagne, la droite assimilant islam et NSDAP, et la gauche rapprochant la xénophobie et le racisme génocidaire. Relevons de manière générale que dans l'histoire, les périodes de crise conduisent à la bouc émissarisation et aux pogroms.

Écrit par : nolats | 28 octobre 2014 |




"on peut se demander [ ] si toute civilisation ne comporte pas, comme sa part d'ombre, une barbarie sous-jacente qui ne demande qu'à se déchaîner"
La violence existe dans la nature humaine, et la civilisation -idéalement- s'efforce de la confiner.
Ceci étant "la" civilisation au sens générique est un concept, chaque civilisation réelle peut comporter plus ou moins de germes de violence, qui se manifestent toujours en alléguant la "défense" de quelque chose: patrie, liberté, identité, arpent de terre... Les valeurs alléguées pour justifier la violence sont souvent instrumentalisés par des groupes séditieux pour qui la violence est l'objectif en soi. Parfois ils sont manipulés et instrumentalisés au premier ou second degré, mais cela donne aussi prétexte à fantasmes complotistes (chargeant la CIA, le Mossad, les franc maçons, les illuminati ou la Cagoule...)

Écrit par : nolats | 28 octobre 2014 |




Je réponds sur la référence 33/45 que je fais par deux fois : il faut voir le "contexte" de la note (par ailleurs informel) qui concerne un pays où la démocratie s'est massivement effondrée en générant une barbarie sans nom et qui pour cette raison doit être exemplaire dans la défense d'une société démocratique aujourd'hui, ce qui pose par exemple la question s'il faut ou non interdire ce genre de manifestations. Ce contexte donne une certaine pertinence à la référence, vous ne pensez pas ?

Écrit par : sk | 28 octobre 2014 |




"Cela n'a rien à voir avec la liberté de manifester et devrait par conséquent être interdit", a-t-il déclaré.

On n'aurait donc pas le droit de manifester contre les salafistes ?
Écrit par : michel | 28 octobre 2014 |




Pourquoi à Cologne, à cette date ? Y avait-il un prétexte, une circonstance à ce ralliement spontané et débordant de petites frappes ?

Les aspergeurs d'huile sur le brasier identitaire aimeraient se distinguer. Ils diraient « vous voyez, je vous l'avais bien dit, le pays va mal… » et de poursuivre « Si vous m'aviez écouté… ». C'est la technique de l'engrenage : si la politique montrait des muscles pour "protéger/figer" l'identité Nationale (c'est-à-dire exactement désigner de l'autre à rejeter) alors ces jeunes ne ressentiraient plus le besoin de "faire le boulot eux-mêmes, sans doute". Au fond, comme en surface, pour lutter contre le fascisme et la dictature, donnons dans le fascisme et la dictature. Et l'on sait que ceci n'est pas un caricature de "la pensée" d'un F. ou d'un Z. (pour reprendre les acronymes de votre dernier billet).

Ces opinions, souvent promues en grille-de-lecture obsessionnelle (écouter F. !), rabaissent la pensée au niveau de la peur, une peur dont elles s'enorgueillissent d'être le reflet, exact et populaire. Cependant ce n'est même plus une peur réelle, c'est une démission hystérique.
Et de leur position d'alerteurs éclairés, ils sont clairement passés à l'attaque, afin de provoquer et d'aggraver, on dirait, les fêlures qu'ils ont prédites.

Et qu'en est-il du contenu de cette identité tant défendue ? A vrai dire, entendre Nicolas Sarkozy invoquer « Le pays de Proust » pour fustiger le cosmopolitisme et l'étranger, c'est assez.
Si c'est ça la Culture, un capital figé et récupérable à toutes les sauces, alors non, ils ne sont pas dignes de définir ou de défendre notre culture.

Ça me rappelle un vieux truc saussurien : il n'y a pas de Langue sans Parole. Aussi riche et imposante que soit la tradition littéraire d'une Langue, si elle n'a plus de locuteur, ce n'est qu'une langue morte. Et aussi petit soyons-nous dans cette langue que nous pratiquons parfois "imparfaitement", il n'y a personne d'autre que nous qui porte cette langue, et si nous n'étions pas là, elle n'existerait pas.

Dans le cas présent, s'il n'y a pas de tradition vivante (de l'humanisme), alors notre belle et ancienne Culture (humaniste) n'est qu'un paquet commercial figé, un attrape-nigaud pour justifier on ne sais quel penchant mortifère, à tendance néo-coloniale bien sûr. Ceux qui crient le plus fort à la défense de notre culture la représentent bien mal.
Comme ces Hooligans, ils n'en sont que la honte, portée avec gène — ce dont l'Allemagne a plus conscience que la France.
France où l'on relaie sans problème un "Zemmour l'insoumis" (couverture de Valeurs Actuelles) qui écrit pourtant sans rire que Pétain a sauvé des Juifs. Dieudonné à côté est vraiment un comique.

PS: je sais, avec de telles digressions, on va encore me dire d'aller dire ça sur mon blog…
Mais c'est bien toi, SK, qui les suscite.
Écrit par : Leterrier | 29 octobre 2014 |




@ Leterrier

Je crois que N. Sarkosy se revendique de Proust pour la syntaxe.
Écrit par : Benoît | 31 octobre 2014 |



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