vendredi 24 juin 2016

The Show Is Not Over Till The Fat Lady Sings




Est-ce que la « grosse dame », dont l’aria clôt le spectacle, a donc chanté ? – Et venons-nous d’entendre le « chant du cygne » du « Projet Européen » ?

Un commentateur britannique a dit aujourd’hui qu’il restait une sortie de secours – emergency exit – si le parlement, favorable aux deux tiers à l'Europe, annonçait sa dissolution et de nouvelles élections. En effet, le résultat du référendum n'est « contraignant » que sur le plan politique, ce qui a conduit David Cameron – promoteur du « remain » – à annoncer sa démission d’ici à octobre, mais cette « consultation populaire » du 22 juin 2016 n'oblige pas le Royaume-Uni à sortir – de jure – de l’UE. Or, elle a aussitôt été interprétée – notamment par les « places financières » – comme une sortie de facto.

Reste également un problème  « interne » de taille : L'Écosse qui, comme l'Irlande du Nord, a voté en faveur de l'Europe ne compte pas en rester là. Ainsi, un second référendum pour le maintien de l'Écosse au sein du Royaume-Uni « est sur la table », selon l'expression de Nicola Sturgeon, la Première ministre calédonienne.

On peut également se demander si le Royaume-Uni n’était pas déjà sorti de l’Europe avant même qu’un « Brexit » ne se dessine à l’horizon : rejoignant les membres fondateurs en 1973, année du « choc pétrolier », il a toujours tenu à conserver sa monnaie et sa place financière parmi les plus fortes du monde, sa participation à l’Espace Schengen (depuis 2000) n’est que partielle puisque le contrôle des passeports reste applicable aux frontières de l’île, ses contributions financières à l’Union sont somme toute limitées après la « correction britannique », obtenue par Mme Thatcher (« I want my money back », 1979) « correspondant aux deux tiers de la différence entre ce quil perçoit et ce qu’il verse » (ici).

Une autre question est la manière dont la campagne – remain vs. leave – a été menée de part et d’autre. Tout d’abord, on ne s’avance pas beaucoup en disant que David Cameron s’est tiré une balle dans le pied – ce qui est le cas de le dire en plein Euro 2016 où l’Angleterre, l’Irlande du Nord et le Pays de Galles ont tous trois atteint les huitièmes de finale – puisqu’il est le principal artisan d’un référendum, destiné pour une bonne part à faire pression sur l’Europe, qui entraîne sa propre chute et risque de propulser au sommet son rival et condisciple Boris Johnson, tous deux ayant été membres du prestigieux Bullingdon Club lors de leurs études à Oxford. – Par ailleurs, les arguments ont surtout tourné autour de l'immigration - du pain bénit pour le populiste Nigel Farage – et de l’« économie » : les uns et les autres entendaient faire peur à l’électorat de base qui, légitimement, se fait des soucis pour ses emplois et ses avantages sociaux, déjà réduits au strict minimum par des cures d’amincissement successives, tant par la Torie Thatcher que par le Labour Blair. - Avec les pertes des valeurs boursières qui ont atteint des montants fabuleux en ce 23 juin 2016, l’électorat de base devrait savoir une chose : en « fin de compte », les pertes des riches sont toujours épongées par les pauvres !

Si le Brexit, comme tout le laisse présager, se concrétise : est-ce une mauvaise ou une bonne nouvelle pour l’Europe, alors réduite à 27 États-membres ?

Les exigences formulées par Mr. Cameron sous la menace du référendum avaient en effet quelque chose de profondément scandaleux car elles réclamaient de nouveaux avantages sans contrepartie, sans partager la monnaie et la place boursière, sans adhérer à l’Espace Schengen etc. Elles entraînaient donc l'UE vers plus d’injustice, plus d’ultra-libéralisme encore, l’éloignant davantage de ce qui aujourd’hui – et ce serait la bonne nouvelle – est devenu plus nécessaire que jamais pour que l’Union ne se disloque pas complètement : l’avancée vers un État social au niveau continental qui implique une harmonisation fiscale, un salaire minimum en fonction des coûts de la vie, une couverture sociale pour tous etc.

La mauvaise nouvelle, c’est que l’on nous impose un divorce d’avec notre cousin, le common man britannique, à cause de manipulations et tractations au sommet et dans les arrière-boutiques, d’avec le fameux Working Class Hero de John Lennon qui, très probablement, paiera une nouvelle fois les pots cassés (*).








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(*) Premier revers pour les « vainqueurs » qui croyaient que l’argent versé à l'UE irait au système de santé britannique (NHS), ce que Nigel Farage, le populiste du Parti Indépendantiste (UKIP), dément dans une interview sur ITV (24 juin 2016) devant les journalistes médusés, alors que la mesure, qu’il considère comme une « erreur », faisait partie du « programme » (de la « propagande ») des euro-sceptiques, poussant, comme le suppose l'intervieweuse, un certain nombre de gens à voter en faveur du « Leave » ... Et Mr. Farage de noyer le poisson en prédisant, avec la mort de l’UE, la possible résurrection du Commonwealth... histoire de rassurer les gens qui auraient la santé fragile par les temps qui courent !



Et pour l'immigration accusée de prendre à moindre frais les jobs des britanniques, aucun changement fondamental n'interviendrait après la sortie de l'UE, selon ce député conservateur favorable au « Leave », de sorte que le journaliste de la BBC se demande ici aussi sur la base de quels arguments les gens ont voté le « Brexit ».