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mercredi 7 février 2018

Les grocolis


 Les grocolis

Depuis l'élection fédérale du 24 septembre 2017, quatre mois et deux semaines se sont écoulés sans que les partis soient à même de constituer un gouvernement, mais ce 7 février 2018 un accord entre l'Union de Maman Merkel (CDU/CSU) et le SPD de Papa Schulz est enfin intervenu. On est prêt à signer le contrat de coalition lorsqu'un dernier détail sera réglé : le vote de la base social-démocrate - c'est-à-dire des 463.723 adhérents du SPD - dont l'organisation réclame trois semaines supplémentaires. - C'est donc vers la fin février que l'Allemagne passera du pareil au même - d'une GroKo à l'autre - après cinq mois de flottement et de "gouvernement par intérim"...

En Allemagne, on ne se demande plus pour qui mais pourquoi voter et surtout : pourquoi tout ce tremblement, flottement, toutes ces incertitudes, turpitudes, ce "gouvernement par intérim" qui traduit cette belle expression iconoclaste de "geschäftsführende Regierung", simple "gestion intérimaire" où le ministre "sortant" de l'Agriculture (CSU) se permet tout de même de voter en faveur du glyphosate au parlement européen sans consulter le Bundestag fraîchement élu - oui, pourquoi tout ce remue-ménage, cette excitation, cette exaltation pour finalement faire du sur-place ou, comme qui dirait, pédaler dans la semoule ?

Mais que s'est-il passé au juste ? 3/4 des inscrits sont allés voter le 24 septembre pour accorder sur les 709 sièges du Bundestag  [entre crochets les résultats de 2013, le parlement comptant alors 631 sièges] :  246 [311] à l'Union - 153 [193] au SPD - 69 [64] à Die Linke - 67 [63] aux Verts - 80 [0] au FDP - 94[0] à l'AfD. - On voit que les électeurs ont sanctionné la GroKo sortante, le SPD obtient son plus mauvais résultat d'après-guerre, l'Union baisse également, les partis de gauche (Linke/Verts) gagnent quelques sièges et les autres entrent - à nouveau (FDP) ou pour la première fois (AfD) - en fanfare au parlement. - Pour les analystes politiques, le message est clair, même si l'on peut y déceler un sfumato fondamental, car si l'entrée des populistes au Bundestag constitue une nouveauté et pour beaucoup un scandale, elle ne participe finalement que d'un mouvement général venu d'Europe de l'Est, et en effet l'AfD est beaucoup plus forte dans les anciennes régions de RDA, avec une mention spéciale pour la Saxe, l'ancienne "vallée des ignorants" (parce qu'on n'y recevait pas la télé de l'Ouest). Mais le mouvement commence à essaimer, et avec les évolutions en Pologne, en Tchéquie et en Hongrie, la nouvelle coalition ÖVP/FPÖ en Autriche et le score du FN en France (tout de même 33,9% il y a moins d'un an) montrent qu'à l'ère de la mondialisation et d'une "construction européenne" sans fin et sans volonté politique, le nationalisme "pur et dur" fait un remarquable come-back sur la scène inter-nationale. -  L'autre versant de cette affaire, qui la rend encore plus floue, c'est le consensus mou qui règne au centre avec les Grocolis allemands et les - hum ! - Macarons français, que personne n'aime vraiment mais que la majorité -  par son "vote utile" ou "anti-extrémiste" - ne cesse de confirmer au pouvoir...

10 février

Le vote des  adhérents du SPD aura donc lieu du 26 février au 2 mars, et le résultat sera connu le dimanche 4 mars. En attendant, Papa Schulz jette l'éponge : après avoir renoncé à la présidence du SPD au bénéfice d'Andrea Nahles ("Martin s'est sacrifié"), il renonce à présent à un poste ministériel dans un nouveau gouvernement Merkel, en affirmant que "le débat autour de ma personne" ne devait pas influencer négativement le vote des adhérents.  C'est donc ainsi que se conclut apparemment l'incursion de l'Européen Schulz en politique nationale. - Pourtant, en janvier 2017, sa désignation à l'unanimité comme candidat SPD à la chancellerie puis, en mars, son élection comme chef du parti social-démocrate allemand avec 100% (!) des suffrages ont  permis tous les espoirs : le libraire rhénan de condition modeste qui avait fait son chemin jusqu'à la présidence de la Commission UE faisait le poids face à une Maman Merkel affaiblie par sa "politique de bienvenue" de 2015 ("Nous y arriverons !"). Du coup, le baromètre des sondages taquinait les 30%, voire plus, et la chute ne pouvait être que plus dure : après les trois élections "régionales" ("Landtagswahlen") perdues, la météo politique prévoyait du gros temps, et en effet, avec environ 1/5 des voix exprimées en septembre 2018, le SPD - ce grand parti qui avait contraint Bismarck a introduire les premières lois de protection sociale au monde, puis fourni, avec Friedrich Ebert, le premier président de la république de Weimar et, avec Willy Brandt, l'un des chanceliers les plus charismatiques de l'après-guerre - était réduit au rang de second couteau. Et comme si ce n'était pas suffisant, Martin Schulz commet sa plus grande erreur en déclarant qu'il choisit l'opposition et qu'il n'est pas question de former une nouvelle grande coalition sous la direction de la chancelière sortante. La suite est connue...

Andrea Nahles (*1970), photo : FAZ


[en cours]

samedi 9 septembre 2017

GroKo, dernière

D'un côté, les hardliners du Brexit et l'outrecuidant Donald Trump sont passés comme une lettre à la poste, de l'autre la débandade des partis traditionnels et le dégonflement télévisé de la baudruche walkyrienne en France ont fait élire Macron les doigts dans le nez, et voilà que nous assistons à une non-campagne électorale en Allemagne : le "duel TV" entre Maman Merkel et son "challenger" Papa Schulz s'est fait à coups de "là, je donne raison à Mme Merkel" et de "comme l'a dit M. Schulz", pour se terminer en rafales de sourires couillemollesques ...

Sur les bords, nous avons à la gauche de Martin Schulz (SPD) les révolutionnaires de salon de Die Linke et les écologistes gentrifiés de Die Grünen, à la droite de Mme Merkel (CDU) les réactionnaires bavarois tendance bière-saucisse de la CSU et les fafs en voie de dédiabolisation de l'AfD. Au centre, le néo-libéral Christian Lindner (FDP) fait son beau gosse, mais comme il vient de déclarer qu'il n'a "pas assez d'imagination" pour une coalition avec Les Verts (CDU/FDP/Die Grünen, la "Jamaika-Koalition" : noir, jaune, vert) et comme par ailleurs la cheftaine de Die Linke, Sahra Wagenknecht, Mme Oskar Lafontaine à la ville, est en train de nécrophiliser une possible coalition rouge-rouge-verte (Die Linke/SPD/Les Verts), la seule perspective réaliste pour la législature 2017/2021 reste le replay de la GroKo sortante (la Große Koalition CDU/SPD), même si Martin Schulz s'y est expressément refusé, mais comment pourrait-il dès à présent accepter de passer ces quatre prochaines années à comater comme junior partner de Mutti Merkel quand la campagne électorale bat encore son plein en brassant déjà du vide ?



"Heute Show" (8/9/2017), la satire politique hebdomadaire du ZDF
Appréciez la chanson, qui souligne le "Duel Câlin" de dimanche dernier
Toute l'émission (45 min. / Deutsch) sur la page FB de skenligne

jeudi 11 décembre 2014

Je veux garder mon Allemagne de Mme Merkel


Jean-Luc Mélenchon, photo : dpa, choisie par Bild (lien ci-dessous)


« Maul zu, Frau Merkel ! Frankreich ist frei ». - Dans un allemand correct, mais un peu vieillot et rudimentaire, Jean-Luc Mélenchon interpelle la chancelière qui vient à nouveau d'être plébiscitée à la tête de son parti, la Christlich-Demokratische Union (CDU). - Et le politicien démissionnaire du Parti de gauche d'ajouter : « Occupez-vous de vos pauvres et de vos équipements en ruines ! »


Si le quotidien Les Échos considère que « La presse allemande en ligne reprend largement le message de l’homme politique de gauche qui a appelé la Chancelière allemande à "la fermer" vis-à-vis de la France », l'impact sur l'opinion d'outre-Rhin n'est guère plus important que la récente élection d'un ministre-président du Parti de gauche en Thuringe l'est en France. Il est étonnant, par exemple, que l'hebdomadaire du centre gauche Der Spiegel reprend pratiquement le même texte que le quotidien populiste Bild : on en conclut qu'il s'agit de la même dépêche d'agence (isa/AFP) que les rédacteurs de ces deux publications aux antipodes n'ont pas pris la peine de développer.


dimanche 17 février 2013

Nécros

En Allemagne, ce qui est resté de l'accession du cardinal Ratzinger à la papauté, c’est le titre de Bild, la feuille de chou populo-racoleuse : Wir sind Papst! (Nous sommes Pape !). Ce titre est devenu l’emblème du bon titre de presse, Bild l’a même affiché en grand sur son immeuble…


Quel titre aujourd’hui ? Wir waren Papst (Nous étions Pape)... ? Déjà pris : Tagesspiegel, Frankfurter Rundschau... ! - Mais de fait, dans ce contexte, le latin s'impose : Eramus Papam - Habebimus Papam...


En tout cas, après la démission forcée de l'amie Schavan samedi dernier, Angela Merkel avait un nouvel hommage à rendre :






On ne peut s’empêcher de sourire : alors que la nécro de Benoît XVI était déjà prête dans les tiroirs, voilà qu'il fallait tout réécrire ! - Ainsi, Angela Merkel termine son hommage à Joseph Ratzinger en lui souhaitant « plein de bonnes choses pour les prochaines années » („Alles Gute für die nächsten Jahre“). Heureuse chute : comme quoi l'hommage posthume à un vivant de 85 ans, ça ne s’improvise pas !

Et c'est donc à Pâques, quand la petite fumée annoncera la conclusion du conclave, que l'on s'écriera à nouveau : Habemus Papam... Mais dès ce soir, tous les rédacteurs sont sur la brèche : Qui sera Pape ? - Nous ? - Surement pas...

lundi 11 février 2013

[Feuilleton] Fin de partie

C'est donc ce samedi, après avoir perdu son titre de Docteur, que la ministre fédérale de la Formation et de la Recherche, Annette Schavan, présente officiellement sa démission, qui a été acceptée par son amie Angela Merkel.

Le téléphone pleure

On s'y attendait bien sûr. Mais on a fait durer le suspense depuis ce jour fatidique de mardi où l'Université de Düsseldorf a privé la "ministre des Sciences" de son doctorat pour plagiat. Mme Schavan se trouvait alors en Afrique du Sud, et elle n'est rentrée à Berlin qu'hier soir. Pour mijoter son thriller, la presse a donc insisté sur la déclaration d'un porte-parole de la chancellerie affirmant que les deux femmes amies allaient avoir un entretien en tête à tête. - Quand ? - Nous ne le savons pas... Peut-être dès vendredi soir... Ou samedi matin... Ce week-end, certainement...

Or, nos marchands de communication nous le rappellent à chaque instant : le téléphone existe bel et bien !

L'entretien entre la chancelière et sa ministre a donc certainement eu lieu dès mardi soir par ce téléphone rouge que tout chef d'Etat garde sans cesse à portée de main, mais il était évident que la démission programmée ne serait officielle que samedi, au retour des deux amies à Berlin, en provenance de Bruxelles pour l'une et de Johannisburg pour l'autre...

Le coeur très lourd

Mme Merkel [@tagesschau.de] : "...J'ai accepté cette démission le coeur très lourd (sehr schweren Herzens) [...] C'est uniquement le coeur très lourd que j'ai accepté cette démission parce que, avec Annette Schavan, l'une des politiciennes les plus reconnues et les plus chevronnées de la Formation et de la Recherche de notre pays, au fond la politicienne la plus reconnue et la plus chevronnée de la Formation et de la Recherche de notre pays, va quitter le gouvernement fédéral..."

Sans doute les experts en rhétorique sauront-ils dévoiler les raisons profondes de ces répétitions, figures de style si prisées en politique...

Mme Schavan [loc.cit. (!)] : "... Je remercie tout d'abord la chancelière, je te remercie, chère Angela, pour tes paroles et ton hommage aujourd'hui, ainsi que pour la confiance et l'amitié tout au long de ces années, l'amitié ne s'attache pas à la durée des fonctions et perdurera après ce jour. -  Mesdames et Messieurs, le 2 mai de l'année dernière, des accusations anonymes de plagiat ont été rendues publiques au sujet de ma thèse vieille de 33 ans. Le même jour, j'ai prié le recteur de l'Université de Düsseldorf de faire examiner ces accusations. Mardi dernier, la faculté philosophique a décidé d'invalider mon doctorat. Je n'accepterai pas cette décision et je la contesterai en justice. Je n'ai ni copié ni fraudé dans ma thèse. Ces accusations, je l'ai dit à plusieurs reprises ces dernières semaines, ces derniers mois, me touchent profondément. [...] Lorsqu'une ministre de la Recherche porte plainte contre une université, cela porte à conséquence pour ma fonction, le ministère, le gouvernement fédéral, mais aussi pour la CDU. C'est exactement ce que je veux éviter ; cela n'est pas possible, la fonction ne doit pas être abîmée [...]  Ma décision procède très précisément de la responsabilité avec laquelle je me suis efforcée de conduire ma fonction. Une responsabilité liée à la conviction souvent formulée comme ceci par Erwin Teufel [Ministre-Président du Bade-Wurttemberg de 1991 à 2005 et président de la CDU de cette région, n.d.t.] : 'D'abord le pays, ensuite le Parti et enfin moi-même.' Voilà pourquoi je pense que ce jour est un jour propice pour quitter mes fonctions au ministère et me concentrer sur mon mandat au Bundestag. Merci beaucoup." (traduction : skarlet)



Fin de Partie

Brièvement repris aujourd'hui par une dépêche de Reuters France, ce n'était en somme qu'un de ces feuilletons nationaux, qui est pourtant révélateur à plus d'un titre.

D'abord, le caractère prestigieux du doctorat en Allemagne, qui constitue un formidable accélérateur de carrière dans ce pays...

Ensuite, une question peu approfondie par les divers commentateurs : Quelles règles président à l'attribution de ce titre prestigieux ? L'université n'est-elle pas également fautive d'avoir laissé passer les thèses litigieuses de Mme Schavan (CDU), de M. zu Guttenberg (CSU) ou encore de Mme Koch-Mehrin (FDP), toutes trois annulées par la suite ?

Dans cet ordre d'idées, il n'est certainement pas très pédagogique de délivrer des diplômes aussi prestigieux à des étudiants peu sérieux quand on crée par ailleurs de l'échec scolaire pour beaucoup moins que ça. Et si ces "Docteurs" réussissent ensuite dans la vie publique, comment expliquer aux enfants que l'on a pu accréditer des "tricheurs" ?

D'où il suit que ce système basé sur des évaluations parfois peu objectives ou cohérentes, un carriérisme forcené et la concurrence féroce qui règne dans les écoles et les universités devrait sans doute être revu. Or, ce n'est pas le cas puisque, comme si souvent, on évacue le problème en le personnalisant, c'est-à-dire en reléguant une question générale dans la sphère privée, en transformant une possible erreur ou faute de méthode et de procédure en un accident de parcours qui subit bien souvent une dramatisation proche de la comédie de situation, comme on peut le constater dans ce "feuilleton" et ailleurs.

Alors, combien d'autres titres universitaires de personnalités publiques devront être invalidés avant que le système lui-même se remette quelque peu en question ?

Enfin, il faut rappeler que la principale raison pour un lâchage aussi "amical", outre le manque de crédibilité d'une ministre "dégradée", c'est bien sûr la bataille électorale qui s'annonce. Et sur ce terrain-là, une combattante sonnée avant l'heure compromet sacrément l'issue favorable des opérations. Quant à Mme Merkel, elle a une fois de plus fait la preuve d'un pragmatisme en béton armé !

Epilogue

Déjà désignée, la remplaçante, Johanna Wanka (CDU), 61 ans, qui vient de perdre son poste de ministre de la Culture en Basse-Saxe pour cause de défaite électorale, a certains points communs avec la chancelière sans pour autant être une intime, comme le précise Die Zeit : Scientifique, mariée à un professeur, originaire d'Allemagne de l'Est et militante pour la démocratie avant la Chute. Sa thèse de doctorat en mathématiques s'intitule : Solution de problèmes de contact et de commande avec des moyens de théorie du potentiel (Lösung von Kontakt- und Steuerproblemen mit potentialtheoretischen Mitteln). N'existant pas en version imprimée, ce travail de 121 pages, soutenu en 1980, ne serait disponible que dans trois bibliothèques universitaires : à Halle, Ilmenau et Berlin. - Avis aux amateurs !

jeudi 7 février 2013

[Feuilleton] Partir ou ne pas rester ?

Annette Schavan, qui se voit déchue de son titre de Docteur par l'Université Henri Heine de Düsseldorf, déclare ce mercredi matin à Johannesburg qu'elle déposera plainte et ne démissionnera pas de son poste de ministre fédérale de la Formation et de la Recherche. Et qu'elle n'en dira pas plus en raison de la procédure judiciaire qui s'annonce...


Si les partis d'opposition (SPD / Verts / Linke / Pirates) réclament déjà sa démission à grand cris, la majorité (CDU / CSU / FDP) aura du mal à couvrir la confidente et amie d'Angela Merkel au cours de cette année électorale : tempêtes cérébrales en perspective à la chancellerie...


Il faut dire que si les choses en restaient là, Mme Schavan n'aurait plus aucun titre universitaire, car elle avait suivi un cursus direct, sanctionné par le seul doctorat en 1980, sans étapes intermédiaires comme une licence ou un master : situation compliquée pour une ministre de la Formation et de la Recherche...


Cependant, Mme Schavan semble très respectée par ses pairs et ses partenaires académiques, certaines voix universitaires se faisant d'ailleurs entendre pour minimiser cette accusation de plagiat et contester la sanction de la faculté de Düsseldorf. Et la presse, éternel avocat du diable, se jette également dans la mêlée, histoire de lancer les hostilités : "Pourquoi le retrait du titre de Schavan est une erreur" (Die Welt) - "Schavan doit rester" (Frankfurter Rundschau). Bien entendu, les répliques ne se feront pas attendre : "Schavan doit partir" (Die Zeit) - "Merkel et le cas Schavan : Mauvais départ" (Der Spiegel).


En début d'après-midi, un porte-parole de la chancellerie déclare que Mme Merkel fait "entièrement confiance" à sa ministre contestée et que, dès son retour d'Afrique du Sud où Mme Schavan effectue un voyage officiel, les deux femmes auront "tout loisir de parler"...


Malgré cela, et notamment la possibilité de plaider l'anticonstitutionnalité d'une procédure intervenant 33 ans après les faits, la plupart des commentateurs voient mal comment la ministre pourrait sauver un poste où elle représente officiellement la communauté scientifique et la recherche allemandes, tout en se voyant déchue de son titre académique. Et même si elle le récupérait, ce qui serait un précédent, les interrogations sur la régularité de son travail universitaire continueraient d'occuper les esprits...


S'ajoute la position que Mme Schavan a prise lorsque Karl-Theodor zu Guttenberg était dans la même situation, bien que le doctorat de l'ex-ministre de la Défense, confectionné à l'ère du copié-collé, fût encore beaucoup plus contestable : "Je n'ai pas seulement honte en secret", avait-elle déclaré en 2011, ce qui représentait un désaveu son collègue. Et actuellement, les médias rediffusent en boucle cette image d'Annette Schavan aux côtés d'Angela Merkel, au moment où cette dernière reçoit un texto lui annonçant la démission tant attendue du Baron zu Guttenberg : le sourire de sa voisine est alors pour le moins narquois lorsqu'elle prend à son tour connaissance de la nouvelle...


Et puis, les experts doutent sérieusement du succès de la procédure judiciaire que Mme Schavan semble vouloir entamer. Or, jusqu'au jugement, elle a le droit de conserver son titre et son poste. Sauf si son amie la chancelière trouve les arguments pour la persuader de partir. Car, puisque les écarts sont tout de même serrés dans la course au Bundestag 2013, un feuilleton comme celui-ci, qui traînerait sur des mois, pourrait bien finir par déstabiliser les sortants...


Quant à cet "entretien en tête à tête" entre la chancelière et sa confidente, que les milieux autorisés nous annoncent pour vendredi soir, date du retour de Mme Schavan à Berlin, gageons qu'il a déjà eu lieu - ou qu'il est en cours - grâce à cette merveilleuse invention dont on entend parler au quotidien mais qui, pour le coup, semble avoir complètement échappé aux commentateurs : le téléphone !

 

(à suivre)


merkel-schavan.jpg
Mesdames Merkel et Schavan, photo dapd @ Der Spiegel

 

 

mercredi 30 janvier 2013

[Brève] 30 janvier 1933 - 30 janvier 2013

A l'occasion du 80e anniversaire de la "prise de pouvoir" nazie, une cérémonie de commémoration est organisée ce matin au Bundestag...

Sur la chaîne publique d'information Phoenix, on poursuit le programme avec une prise de parole de la chancelière, qui fait un bref rappel historique et insiste sur le fait que le national-socialisme ne fut possible en Allemagne qu'avec la collaboration des élites et parce que la majeure partie de la population a accepté ou toléré son avènement ("gedultet")...

Un peu plus tard, Mme Merkel recevra M. Mursi, le président égyptien contesté, notamment pour ses mesures autoritaires, mais également pour ses propos antisémites...

Ainsi, l'histoire et l'actualité fusionnent.

****

Sans véritable transition, on entend déjà l'hymne égyptien sur Phoenix... Puis, comme il se doit, le Deutschlandlied... Avant le traditionnel passage en revue des troupes, sur tapis rouge et sous les parapluies... Ensuite, ce sera la non moins traditionnelle conférence de presse des deux chefs d'Etat : vite expédiée. Sans autre commentaire que ce chapeau du Spiegel (je traduis) : "Lors de sa visite à Berlin, Mohammed Morsi a pu entendre des paroles claires de la part de la chancelière: Angela Merkel exhorta le président contesté à respecter la démocratie et la liberté religieuse. Le frère musulman rechigna à la critique - et justifia un propos par lequel il avait heurté des Juifs." 

Conférence de presse Morsi-Merkel, photo AFP @ Der Spiegel

dimanche 27 janvier 2013

[Brève] Non-rencontre au sommet

Angela Merkel, réputée "la plus puissante femme de RFA" et citoyenne de l'ex-RDA (1954-1990), passe un week-end diplomatico-commercial au Chili, où vit encore celle qui fut la plus puissante femme de RDA, Margot Honecker, veuve d'Erich Honecker, le tout-puissant président du Conseil d'Etat (1976-1989) de l'Allemagne communiste, où elle fut également ministre de l'Education de 1963 à 1989.

Les deux femmes ne se rencontreront pas. Et nous ne saurons pas si Margot Honecker profitera de l'occasion pour demander quelque faveur à la délégation allemande. Car, son frère venant de décéder à Berlin, la presse avait spéculé sur une possible venue de l'ex-première dame de RDA à l'enterrement. Cela n'aura pas été le cas. En effet, Mme Honecker pourrait encore risquer des poursuites si elle foulait le sol allemand. Mais comme elle le dit dans l'interview ci-dessous : L'Allemagne actuelle ne l'intéresse pas...

 

dimanche 13 janvier 2013

SPD / Les Verts : Le test grandeur nature

Ce dimanche 20 janvier, une élection régionale - Landtagswahl - se tient en Basse-Saxe (capitale Hanovre) : en principe, la coalition rouge-verte (sociaux-démocrates / écologistes) part favorite, mais...

 Campagne électorale en Basse-Saxe
Photo @ Die Zeit

Même si les libéraux du FDP, autour de leur chef contesté, Philipp Rösler, ont perdu du terrain ces temps-ci, les derniers sondages estiment, peut-être à tort, que le parti pourrait passer la barre des 5% et intégrer le parlement de Basse-Saxe, ajoutant alors aux voix de son partenaire chrétien-démocrate pour éventuellement obtenir une majorité "noire-jaune" (CDU / FDP)...

Peer Steinbrück, le leader national du SPD, atteint des sommets d'impopularité après ses récentes déclarations. Même le soutien de Gerhard Schröder et d'autres personnalités n'y change rien. Or, le patron du parti, Sigmar Gabriel, vient d'affirmer que même si l'élection de Basse-Saxe était perdue, Peer Steinbrück resterait le champion du SPD pour l'élection nationale, alors que toujours plus de voix se font entendre en faveur d'une candidature de Hannelore Kraft, la sympathique Ministre-Présidente de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (depuis 2010)...

De plus, la débacle autour du nouveau grand aéroport de Berlin, qui ne sera sans doute prêt qu'en 2014 (au lieu de 2012) et qui engloutit des milliards d'euros supplémentaires, affaiblit considérablement un autre illustre camarade du SPD, Klaus Wowereit, maire de Berlin depuis 2001, qui vient de sauver son poste au sein d'une "grande coalition" (SPD / CDU), alors qu'il avait déjà conduit la ville jusqu'en 2006 dans le cadre d'une alliance "rouge-rouge" (SPD / Die Linke). Cet opportunisme du médiatique maire de Berlin n'est pas pour remonter le moral des camarades. Et la faillite de l'Aéroport Willy Brandt - quelle idée de donner le nom de ce grand politicien social-démocrate à un gouffre financier assorti d'une réaction en chaîne d'incompétences - n'est pas vraiment de bonne augure pour un SPD qui se préparerait à gouverner le pays...

Pendant ce temps, Mme Merkel caracole en tête de tous les baromètres de popularité. Et rien, pas même le scandale à épisodes autour du président démissionnaire Christian Wulff (CDU), ne promet le plus petit nuage à l'horizon de ce ciel bleu de Prusse.

vendredi 7 décembre 2012

Madame 98 Pourcent



Comme titre la Süddeutsche, les 98% de suffrages qui, lors du congrès de la CDU, reconduisent la chancelière à la tête du parti font naître "l'espoir d'une régence éternelle".  Selon le commentaire de Hermann Prantl, cet exercice d'autosatisfaction se berce dans l'illusion d'avoir déjà battu le SPD...

Si les deux fronts se précisent - d'un côté l'alliance "rouge-verte" (SPD/Ecologistes) et de l'autre le pacte "noir-jaune" (CDU/CSU/FDP) actuellement au pouvoir - l'ambiance générale est à une nouvelle "Grande Coalition" pour octobre 2013, c'est-à-dire un dispositif gouvernemental très allemand où droites et gauches se neutralisent...

Cependant, Angela Merkel a un sacré avantage : elle est populaire, sans doute bien davantage que son challenger Peer Steinbrück (SPD) qui continue de traîner sa casserole de conférencier superbement rémunéré. Et si, au pays du "champion du monde de l'export", le travailleur allemand a tout de même du mal à joindre les deux bouts, il le doit en grande partie à la dérégulation du marché du travail, parachevé entre autres par le social-démocrate Gerhard Schröder qui, à l'image de son collègue britannique Tony Blair, n'a pas vraiment mené la politique sociale que l'on attend traditionnellement de la gauche...

Ainsi, les frontières s'effacent, les fronts molissent et, pendant ce temps, le marché et la finance continuent de régenter un monde soi-disant globalisé, tandis que ce qu'il est convenu d'appeler "la démocratie" semble de plus en plus vouée à n'être qu'une agitation de façade ou, au choix, une idéologie pour tromper les gens sur la réalité du pouvoir...

Quelques sondages récents, laissant présager une nouvelle "Grande Coalition" pour 2013
@wikipedia

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samedi 28 avril 2012

[Traduction] Merkel à propos de la France et de l'Europe (27 avril 2012)

Voici la traduction d'une partie de l'interview que la chancelière allemande Angela Merkel (CDU) a accordé à la Leipziger Volkszeitung le 27 avril 2012. Il s'agit du passage qui concerne l'élection française et l'Europe :

Q. - Est-ce que la possible élection d'un président socialiste en France vous pose des problèmes ? Helmut Kohl s'est montré capable d'une excellente collaboration avec un socialiste à Paris.

A. M. - Ce qui importe pour le moment, c'est qu'il y a, avec le président et son challenger, deux pro-européens dans le tour décisif du 6 mai, dont il faut attendre le résultat. Nicolas Sarkozy et moi-même appartenons à la même famille politique et collaborons très étroitement. Pour la maîtrise de la crise, nous avons initié certaines décisions importantes en Europe. Ceci dit, le président français et le chef du gouvernement allemand arrivent toujours à bien travailler ensemble. C'est une affaire de responsabilité politique, que portent les chefs de gouvernements, en particulier ceux de nos deux pays.

Q. - Peut-il y avoir, comme le veut Hollande, des réajustements pour relancer la croissance dans le cadre du pacte fiscal européen ?

A. M. - Il n'y aura pas de renégociation du pacte fiscal. 25 chefs de gouvernement l'ont signé. Au Portugal et en Grèce, il est déjà ratifié ; en Irlande, il fera l'objet d'un referendum fin mai. Dans beaucoup d’États membres, comme en Allemagne, le pacte fiscal est actuellement soumis aux parlements.

Q. - Donc pas de relance supplémentaire de la croissance ?

A. M. - Elle est déjà à l'ordre du jour dans l'UE depuis l'année dernière. Plusieurs conseils européens s'y sont déjà penchés très concrètement ; pour le conseil de juin, nous préparons un agenda de croissance. Dès à présent les pays peuvent
, par exemple, utiliser les fonds structurels de manière plus flexible afin de venir en aide aux moyennes entreprises. Notre politique pour surmonter la crise de la dette publique repose sur deux piliers : d'un côté, une politique financière solide, sans laquelle aucun dépassement de la crise de la dette ne sera possible, mais qui à elle seule n'est pas suffisante ; voilà pourquoi, de l'autre côté, il faut une politique qui encourage la croissance et l'emploi, qui rend à nouveau concurrentiels les États, mais sans une nouvelle croissance à crédit. De nouveaux programmes publics conjoncturels n'aideraient pas l'Europe. Ce dont nous avons besoin, ce sont des réformes structurelles. Nous devons lever les obstacles à un bon développement économique ; en Allemagne, nous avons nous-mêmes expérimenté l'efficacité de réformes en profondeur du marché du travail pour une croissance véritable et durable. J'imagine également que nous allons encore renforcer les capacités de la banque européenne d'investissement.

[Traduction de l'allemand : Stefan Kaempfer -  Lien sur le texte original de l'interview]