jeudi 14 décembre 2006

[France 2007] Intermède théologico-politique

France 2007

Intermède théologico-politique(commencé le jeudi, 14 décembre 2006)

     Les événements, s’ils ne se précipitent pas encore, laissent déjà entrevoir certaines tendances insoupçonnées dans ce branle-bas de combat, ce feu de tous bois, ces éructations criardes, qui se tissent actuellement sur la Toile. L’orientation du débat électoral est nettement "théologico-politique", - avatar des pactes entre les différents pouvoirs religieux et politiques, si explosifs et déterminés sur la planète que l’on doit craindre à plus ou moins long terme la régression mondiale à un stade d’abrutissement et de surdité, où un effort de réconciliation ou simplement d’apaisement ne serait même plus envisageable. Et, puisque la poussée intégriste, commune aux trois monothéismes, se propage comme une traînée de poudre à travers la planète, finissant par miner les démocraties occidentales et leur projet de laïcité, les citoyens français, qui sont appelés à élire le président d’une république laïque, risquent fort de se coltiner, par politiciens interposés, les affrontements entre les trois grandes religions et leurs ambitions planétaires de domination. En France et ailleurs, le sport national consiste déjà à proférer, au nom de la laïcité, des paroles forcément perçues comme insultantes par les croyants d’une confession particulière. Or, le problème est surtout que les attaques contre une religion déterminée déclenchent nécessairement des solidarités; qu’elles soient menées pour des raisons de médiatisation personnelle ou dans un but électoral, ces attaques vont évidemment interpeller l’ensemble des gens concernés par la religion incriminée, même s’ils entretiennent une relation personnelle tout à fait "détendue" ou "lointaine" avec leurs origines et la religion de leurs ancêtres. Mais ce n’est pas tout. Puisqu’il s’agit d’une élection présidentielle, toutes ces polémiques, dont on ne peut que redouter l’amplification, vont intégrer les différentes campagnes et tous les projecteurs vont se braquer sur les options politiques des polémistes, - même les forcenés de l’egotrip médiatique vont finir par se faire happer et choisir leur camp. -


Désorientation


 En gros, il n’y a plus qu’une alternative et deux discours. Le premier peut être considéré comme modéré, démocratique. Que l’on soit UMP, UDF ou PS, on sait bien qu’on ne changera pas fondamentalement les choses; on les aménagera au mieux et on essayera sans doute de sauver ce qui reste de l’Etat-Providence après une bonne trentaine d’années de crise mondiale afin d’éviter la guerre civile au pays. L’autre discours est ouvertement révolutionnaire. Que l’on soit de la gauche ou de la droite extrême, il faut en finir avec le "Système UMPS". Il faut que le peuple se réveille, se révolte contre des dirigeants incapables et malhonnêtes, qui l’ont trahi pendant des décennies. - Voilà les deux options entre lesquelles l’électorat français va être obligé de choisir. Sa confusion sera bien sûr immense. Non seulement, la différence traditionnelle entre la droite et la gauche parlementaires semble s’estomper. Mais, à force de le répéter contre tout bon sens politique, les extrêmes ont peut-être vraiment fini par se rejoindre. Et, avec cette perte de repères et d’orientation, les votes de l’électorat français risquent d’être à la hauteur de sa confusion, une fois encore, en dépit de tout bon sens politique. 


SUITE 

jeudi 7 décembre 2006

[France 2007] Le vif du sujet

France 2007
 Le vif du sujet
commencé le samedi, 18 novembre 2006


C’est donc Ségolène Royal, élue à plus de 60% par les adhérents du PS, qui affrontera le probable candidat de l’UMP, Nicolas Sarkozy, dans la course à l’Élysée. Ce dernier s’en félicite. Depuis le début, il voulait cet affrontement (0). Peut-être sait-il quelque chose que nous ne savons pas, quelque chose que, cependant, nous ne manquerons pas de savoir au cours de ces prochains mois. On se souvient des affaires qui ont jalonné les affrontements du passé, comme l’affaire Gordji (1) qui pimenta le face à face télévisé entre François Mitterrand et Jacques Chirac en 1988 (2). Et lors des présidentielles de 1995, où le Président Chirac avait un rival à droite en la personne de son Premier ministre Édouard Balladur, c’était l’affaire des HLM des Hauts-de-Seine (3) instruite par Éric Halphen et des écoutes téléphoniques menées par Matignon, qui déstabilisa Balladur, assurant  la présence au second tour de Chirac et donc sa victoire finale sur Lionel Jospin. Enfin, en 2002, comme nous l’avons remarqué, c’était une sordide série de faits divers (4), montés en épingle par tous les médias français peu avant le scrutin, qui remit à la Une le "problème de l’insécurité", le cheval de bataille de Jean-Marie Le Pen, présent contre toute attente au second tour avec pour effet de mettre hors course Lionel Jospin, le principal rival du Président Chirac, qui aurait peut-être triomphé cette année-là.
Par les temps qui courent, point d’affaire sans médias. Et Internet en est devenu l’un des principaux fournisseurs. Dernière en date, l’aparté de Ségolène Royal sur les enseignants vu à ce jour quelque 20.000 fois sur Google et quelque 10.000 fois sur YouTube, mais plus de 650.000 fois sur Dailymotion (toutes vidéos confondues). C’est déjà la deuxième fois que Ségolène Royal provoque les foudres de l’opinion publique, après sa tirade à résonance populiste sur les mesures draconiennes qu’il faudrait prendre à l’encontre des délinquants mineurs, propos encore en ligne dans Le Figaro (du 1/06/06). La vulnérabilité qui procède de ce genre de déclarations plus ou moins "spontanées", en tout cas non mesurées, n’aura pas échappée à Nicolas Sarkozy. Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn avaient déjà leurs casseroles, l’un avec l’affaire dite du "sang contaminé" (5), l’autre avec l’affaire Méry (6). Ce qui les aura rendu prudents, ces "Éléphants du PS", comme on les appelle sans grande tendresse. Quant à Ségolène Royal, ce sont pour l’instant ses frères par qui le "scandale" risque d’arriver, l’un étant soupçonné d’escroquerie (7) et l’autre du posage de la bombe qui fit couler le bateau de Greenpeace à Auckland en 1985 (8), comme le rapporte par exemple Le Nouvel Observateur (du 29/09/06). Ou bien, si les frères ne font pas l’affaire, l’opinion avide d’informations "personnelles", - toujours dérisoires face à l’enjeu colossal que représente une élection présidentielle, - va-t-elle découvrir un épisode trouble dans le passé de Ségolène Royal, une infidélité dans le couple Royal-Hollande (remake)? Et ces informations aussi dérisoires que médiatiquement performantes sont-elles déjà dans la manche des prestidigitateurs du camp adverse?
Ensuite, que nous réserve l’actualité de ces prochains mois? Quels ’faits divers" alimenteront la campagne pour l’orienter dans un sens ou dans un autre? Insécurité (remake)? Révoltes en banlieue? Attentat terroriste? Et sur le plan économique? Quels chiffres arriveront sur le tapis? Chômage? Pouvoir d’achat? Gageons que l’on n’aura pas chômé sur le sujet dans les divers QG de campagne. Et la situation internationale alors? Quels conflits mondiaux sont susceptibles de troubler cette élection somme toute "régionale" à l’échelle planétaire et la quiétude des "régionaux de l’étape" avec leurs poussives rengaines sur "l’état de la France"? Quelles seraient les réactions des ténors et, notamment, du chef de l’État Français si, en pleine campagne électorale, le pays était confronté à une crise internationale majeure, comme elle pourrait se produire en Palestine, en Irak, en Iran, ou en Corée du Nord, pour ne citer que quelques poudrières? Enfin, la "crise mondiale", qui se solde par la paupérisation croissante des populations avec l’enrichissement sourd, aveugle et absurde de quelques-uns, n’a pas dit son dernier mot. Elle pourrait prendre des proportions aussi ingérables que la destruction massive de l’environnement, qui se poursuit inexorablement sans qu’aucune mesure coercitive sérieuse ne soit prise, promettant de déboucher, lentement mais sûrement, sur une catastrophe globale face à laquelle l’Apocalypse dépeinte par l’évangéliste Jean ressemblerait à une idylle bucolique. - C’est à ce point que l’on risque de nous prier de revenir à nos moutons. Et l’on n’aura pas tort, car une crise économique mondiale, une destruction massive de l’environnement ou un conflit international majeur ne valent pas bien cher contre les possibles activités douteuses des frères Royal ou les frasques amoureuses de Mme Sarkozy.