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dimanche 29 mai 2016

Présidentielles : Marine Le Pen vs. Jean-Luc Mélenchon

Les candidats de la droite et de la gauche modérées sont éjectés au premier tour. Il ne reste donc à l'électorat que le choix entre la droite et la gauche dites "dures", tendance extrémiste-populiste. Ce dimanche soir, en l'absence des formations traditionnelles, les deux candidats représentant ces courants extrêmes seraient "au coude à coude" (*), comme titre la presse, en attendant les résultats définitifs demain.

 
Bien sûr, le second tour de ces présidentielles ne se déroule pas en France mais en Autriche, où la fonction de président est plus représentative qu'exécutive, et les deux derniers candidats en lice ne s'appellent pas Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon mais Alexander Van der Bellen (72 ans, soutenu par les Verts, 21,34% au 1er tour) et Norbert Hofer (45 ans, candidat du FPÖ, populiste de droite, 35,05% au 1er tour).

Or, comme nous le savons tous, ce scénario s'est déjà partiellement réalisé lors des élections de 2002 en France, où le Président de la République dispose au contraire d'un pouvoir politique très important, et la plupart des commentateurs s'accordent à dire qu'il y a de bonnes chances pour que cela se reproduise en 2017.

L'axiome de base veut que l'on ne peut pas, à la fois, être démocrate et déplorer que les votes de l'électorat ne soient pas conformes aux attentes. Mais le danger de la démocratie est que l'électorat choisisse des formations non-démocratiques en se laissant berner par de belles promesses sans vraiment s'informer sur la faisabilité du programme proposé dans le cadre d'un État de droit, mais aussi en accordant aux politiques des pouvoirs dont ils ne disposent pas - ou plus - sous le haut patronnage de ce qu'il faut bien appeler la gouvernance mondiale de l'économie de marché et de la finance internationale.

Les mots-clés sont l'information et la faisabilité. Il est légitime de critiquer la façon dont les "informations" sont gérées par ceux qui les produisent - médias et éditorialistes, propagandistes et idéologues, politologues et sondeurs etc. - mais également par ceux qui les reçoivent, c'est-à-dire l'électorat de base qui doit "se faire une opinion" et déterminer ses choix en fonction d'un certain nombre de critères tant théorétiques que pratiques, voire même affectifs ou sentimentaux. Si la critique des médias est devenu monnaie courante, on n'analyse pas suffisamment la réception des informations, et notamment le manque fréquent d'esprit critique, la difficulté de hiérarchiser les informations, de vérifier les sources, d'identifier les nombreux cas de désinformation, de séparer l'information des interprétations et des spéculations, alors que les outils de contrôle sont maintenant à la disposition de tous. Sans doute peut-on constater ici une insuffisance en matière de culture démocratique : faut-il blâmer nos institutions et notamment l'école, la presse ou plus généralement les médias officiels, ou encore ces citoyens qui n'ont toujours pas intégré les nouvelles possibilités d'information et la part active que celles-ci réclament ?

L'autre point est la faisabilité des différents projets proposés aux électeurs. Vu l'évolution actuelle en Pologne, en Hongrie, en Russie ou encore en Turquie, on peut être inquiet pour l'avenir de la démocratie dans nos propres pays. Un programme démocratique doit être réalisable sans toucher au cadre de l'État de droit, aux valeurs fondamentales de la Constitution et à la séparation effective des pouvoirs. Si ce n'est pas le cas, l'électorat doit s'interroger sur les modalités de mise en œuvre du projet en question. De même, une majorité est requise pour conquérir démocratiquement - et toujours pour un temps limité ! - le pouvoir : il faut donc examiner les programmes proposés sous l'aspect des alliances possibles qui seules permettraient une adhésion majoritaire, et non le genre d'alliances contre-nature qui ont par exemple permis au président Chirac de remporter l'élection de 2002 avec un score digne de l'une de ces proverbiales "républiques bananières". 

Pour revenir plus concrètement aux cas de Mme Le Pen et M. Mélenchon : quelles alliances légitimeraient l'accession à la présidence de la République Française de l'une ou l'autre de ces deux personnalités politiques ? et, si tant est qu'une telle coalition majoritaire puisse exister, qu'est-ce qui nous préserve d'une reprise en main autoritaire ou autocratique lorsque l'une ou l'autre intègre l'Élysée, en sachant que les pouvoirs politiques - et notamment législatifs - d'un Président de la Cinquième République, définis par et pour le Général de Gaulle en 1958, sont plutôt excessifs, comparés par exemple à ceux d'un Chancelier allemand ou d'un Premier Ministre britannique ?

Une contradiction n'aura échappé à personne : si, en effet, le pouvoir politique des gouvernements démocratiques n'est pas négligeable, ils s'avèrent impuissants lorsqu'il s'agit de lutter contre une situation économique catastrophique qui ravage le monde entier. Et cet argument - la fameuse "crise" déjà quarantenaire  -  permet aux uns et aux autres - modérés ou extrémistes - de proposer des "plans de sauvetage" aussi irréalistes qu'irréalisables. Mais surtout : l'impuissance dans laquelle les politiques sont placés face aux diktats économiques et financiers ne doit surtout pas être révélée, car l'électeur doit continuer de croire à cette pensée magique où il suffit de dire pour faire les choses, de dessiner la bête sur les murs de la grotte pour la terrasser.

Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ont en commun un charisme indéniable, qui leur permet de donner un espoir politique aux gens, là où le désespoir économique règne en maître absolu. Et personne ne viendra déniaiser les gens, ni les politiques - établis ou "contestataires" - qui ont besoin d'épouvantails et de divisions pour exister ni surtout les tenants du pouvoir économique et financier dont les activités nuisibles pour la majorité absolue, voire l'ensemble de la planète, ont besoin des "responsables politiques" pour détourner l'attention des véritables causes de la catastrophe présente et donc pour empêcher l'émergence de solutions collectives dont la mise en pratique limiterait globalement et durablement leur immense pouvoir de nuisance.

SK, 22/23 mai 2016

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(*) C'est finalement Alexander Van der Bellen qui, au terme de ces 24 heures de "polar électoral", accède à la présidence de la République d'Autriche avec 50,3 % des votes, soit 31.026 voix d'avance sur quelque 4,6 millions de suffrages exprimées. Le résultat n'a été connu que ce lundi après-midi après le dépouillement des votes par correspondance [ici en allemand].


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Commentaires


  • Bonjour SK,
    Il existe plein de façons de faire de la politique et le Colibri ou Bernard Stiegler l'ont bien compris. J'ai déjà voté pour le FdG mais je sais que ce n'est pas la solution. Pour retrouver un peu de démocratie dans tout ça, il faut partir de la base et informer que des solutions alternatives existent. Privilégier l'agriculture raisonnée et raisonnable (à taille humaine), développer la vente directe, recréer un lien, revaloriser le travail en partant sur le principe de l'entreprise libérée (qui certes met quelques années à fonctionner mais est plus juste et viable) ou les coops etc, etc, etc... sont des manières différentes de faire de la politique. Nous devons nous bouger pour aller vers une autre vie et changer nos habitudes; ainsi les politiques changeront. Nous sommes beaucoup plus nombreux que ceux qui tirent les ficelles et nous devrions, si nous étions moins égoïstes, arriver à renverser le pouvoir de ce petit groupe de financiers qui dirige la planète.
    Bonne semaine.


  • "Il existe plein de façons de faire de la politique" : précision indispensable, merci !


  • ;-)


  • SK, l'idée-force de l'article est-elle que le pouvoir politique est en fait une illusion, ce qui expliquerait le succès des plus illusionnistes? Mais la fin de l'article me semble limite conspirationniste, le "pouvoir économique et financier" dont les politiciens seraient en quelque sortes les marionnettes destinées à détourner l'attention.

    Je vois plutôt un scénario où les entités économiques et financières ont "échappé" aux états via l'extra-territorialisation mondialiste. Les gouvernants sont dès lors partagés entre la volonté de reprendre la main, et la nécessité de tenir compte de la situation réelle qui leur échappe (illustré par Syriza). Car les états dont l'idéologie est la plus capitaliste ne sont pas forcément les moins interventionnistes, au contraire certains d'entre eux pipent les dés à leur profit.

    L'UE est un cas particulier, où il n'existe pas un "intérêt national" à défendre (contrairement à la Chine, le Japon ou les Etats Unis), et cette entité initialement prévue pour un libre-marché *intérieur* mais se défendant vis à vis de l'extérieur, a dépouillé les états qui la compose d'une part de leur souveraineté, mais SANS reprendre à son compte le rôle de protection. De toutes façons, le choix d'une Europe "extensive" ayant intégré des états disparates et aux intérêts divergents était intrinsèquement incompatible avec un marché intérieur dérégulé. Sauf que, dans ce cas de figure, les pouvoirs économiques et financiers y trouvent leur profit (délocalisations compétitives, concurrence interne au lieu de synergie... ), et leurs lobbies ont poussé à la roue, et ce non pas de manière occulte mais quasiment en plein jour puisqu'il y a davantage de lobbyistes accrédités et de technocrates issus de leurs rangs, que de membres des instances dirigeantes de l'Union. Certains états y trouvent leur compte (effet d'aspirateur) et appuient dans ce sens pour leur intérêt bien compris. D'autres sont en quelque sorte la dupe consentante par idéologie, ceux dont le général de Gaulle disaient qu'ils sautent comme des cabris en disant" l'Europe, l'Europe"... Il est clair qu'à ce stade il faudrait reconsidérer les principes pour harmoniser et favoriser la synergie plutôt que la concurrence faussée par les disparités. sans quoi cela fait le lit des populismes.

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    J'ai oublié de rappeler que Plumeplume a publié il y a deux ou trois mois un article sur les lobbies dans l'UE


  • Je suppose que votre utilisation du vocable "conspirationniste" cherche à provoquer une argumentation du propos. Peut-être avez-vous l'habitude des démonstrations, explications, conclusions de la rhétorique classique, mais je ne crois plus depuis longtemps à cette forme d'expression, ce qui devrait vous être apparu en lecteur assidu de mes bafouilles.

    Il s'agit ici du rapport entre l'impuissance inavouée des uns et la puissance occulte des autres. On ne peut être "responsable" que si on dispose du libre arbitre et donc d'une certaine forme de pouvoir. Ainsi, les "responsables politiques" ne doivent surtout pas reconnaître leur impuissance, comme l'avait pourtant fait Jacques Delors à l'époque. C'est pourquoi l'électorat de base, s'il commence à "perdre la foi" dans les partis "traditionnels", continue de voter et donc d'entretenir une forme de démocratie en plébiscitant les extrêmes, démontrant ainsi une impuissance de fait, puisque les extrêmes ne sont pas prêts à conclure des alliances et préfèrent bloquer la démocratie.

    Voilá pour les uns. Mais pensez-vous réellement que le pouvoir immense des autres relève du conspirationnisme ? - Cela se peut en effet, mais dans ce cas, votre admonestation n'a pas été envoyée á la bonne adresse.

    Bien á vous


  • Bonsoir SK. Ne voyez pas dans ma remarque une "admonestation", mais une réaction à la formulation selon laquelle les pouvoirs économiques et financier "ont besoin des responsables politiques pour détourner l'attention..." qui semble évoquer une connivence ou manipulation. D'où ma réflexion sur ce qui me parait être l'enchainement ayant conduit à ce que l'"économie" échappe aux états -et donc la puissance du monde économique par rapport à ceux-ci, constat que nous partageons. J'en profite au passage pour caser mes critiques sur l'UE telle qu'elle fonctionne, c'est un peu ma marotte je reconnais.
    On est d'accord concernant la tentation extrémiste, vu le peu d'effet des politiques "traditionnelles", à quoi s'ajoutent les problèmes identitaires et sécuritaires, mais c'est une autre histoire.

    Bon, en tout cas l'Autriche, par une forte mobilisation, a fait échec au candidat d'extrême droite, ce qui conforte la thèse qui prévaut pour les élections françaises, que quiconque arrivera second lors du premier tour des présidentielles françaises de 2017, sera élu au second tour. Et nos Verts de se prendre à rêver.


  • Mais qui est tenu pour responsable de la situation économique désastreuse en France ? À qui prête-t-on le pouvoir de la "solutionner" ou du moins de la "dédramatiser" ? - Qui accuse-t-on d'avoir failli à cette tâche ? - Allez, je vous fais grâce de la réponse, cher nolats !


  • On est d'accord sur les effets, c'était une question de formulation. Il n'y a pas connivence des gouvernants en tant que missionnés par les grands acteurs économiques extraterritorialisés, mais une situation où leurs marges sont réduites. Etant désignés par les peuples pour "faire marcher le pays", ils endossent l'impopularité des crises et difficultés. On voit dans la crise actuelle le dilemme d'une adaptation imposée par l'environnement, que les grands médias concourent à présenter comme étant absolument inéluctable.
    Mais encore une fois, certains états du monde imposent des contraintes (par exemple taux d'intégration local sur certains produits), que l'UE prohibe, ce qui fragilise la plupart des pays de l'Union, d'où la nécessité de se réapproprier de manière conservatoire une part de souveraineté, tant que l'harmonisation n'est pas en oeuvre dans l'Union qui retrouverait alors un dynamisme et une synergie de par sa taille (au lieu de la concurrence interne stérile). Si on ne le fait pas 'un peu', les souverainistes le feront 'beaucoup' ce qui est une politique du pire.


  • Voici un titre et un chapeau du Figaro de ce jour :

    Raffineries en grève: Total menace de revoir ses activités en France

    Dans un courrier interne, la direction du groupe pétrolier, qui opère cinq des huit raffineries françaises, déplore "une prise en otage" de ses activités et fait savoir qu'elle pourrait envisager de "réviser ses projets d'avenir". La grève touche désormais huit raffineries sur huit. Manuel Valls promet une réponse "extrêmement ferme".


  • En effet, et en plus, il ne reste que 8 raffineries en France, il y en avait trois fois plus dans les années 70. Ceci étant, le type d'actions auquel nous assistons ne motive guère les investisseurs à renforcer leur mise.


  • J'ai mis ce titre / chapeau comme illustration parfaite du propos. Le fait qu'il s'agit d'un "courriel interne adressé aux employés des raffineries" [ http://www.lemonde.fr/economie/article/2016/05/24/total-les-investissements-maintenus-dans-les-raffineries_4925666_3234.html] vient renforcer le "côté obscur" du pouvoir, quant à l'impuissance des "responsables" politiques, elle devrait relever de l'évidence pour un observateur attentif.

    Cela dit, la mise en équation de ces deux pôles me semble plutôt inédite. À creuser donc...

    PS. - Je conseille vivement l'émission "Cash Investigation" de ce soir...


  • bonsoir sk, il me semble
    qu'une transversale transpartisane managée par certains courants économiques voudrait démonter la zone euro, un souverainisme fondé sur le "battre monnaie", contourner donc les partis traditionnels
    que US tire son compte d'une Europe qui oublierait l'est pour le laisser maître eurasien, il vient d'armer le Viet nam, contrat colossal, pour tenir la Chine
    que US vient d'entamer le BRICS
    la liste des grands en jeu mondiaux est longue, une guerre qui ne dit pas son nom et nos petites démocraties devraient exiger des élus qu'ils vont choisir une position claire et un discours de vérité de réalité des intérêts des peuples, de tous les peuples


  • Bonne journée à vous, PARKER !


  • Bonjour Parker. Les postulants au pouvoir sont pour la plupart sincèrement convaincus que les solutions qu'ils défendent résorberont les problèmes, d'où une sorte de méthode Coué pour s'en convaincre et en convaincre les citoyens. L'esprit est prompt, mais l'état est faible...
    C'est triste à admettre, mais les pays qui s'en sortent globalement le mieux sont ceux qui suivent le courant de la mondialisation ultra libérale, avec quelques trucages fiscaux pour attirer les investisseurs (Luxembourg, Irlande...), trucages sociaux pour avoir en coulisse une main d'oeuvre malléable est sous payée (one euro jobs...), trucages règlementaires pour protéger certains secteurs de marché (NSA...), éventuellement trucages de parité monétaire pour booster leur compétitivité internationale (Yuan...). En résumé, ils ne pratiquent pas "l’intérêt des peuples, tous les peuples", mais l’intérêt national au détriment des autres états, et l'intérêt du noyau central de la population au détriment de composantes périphériques précarisées.
    Nous cherchons bien évidemment un meilleur équilibre entre l'efficacité et l'équité, mais entre la solution Mélenchon, la solution Macron, la solution Marine, pas sûr qu'il y ait au catalogue ce que nous souhaitons.

dimanche 10 mai 2015

La grande castagnole de Mélenchon




Jean-Luc Mélenchon, invité de l'émission On n'est pas couché (sur France 2, le 9 mai 2015)

Je me dis à la fois qu'il faudrait peut-être que je lise ce bouquin sur l'Allemagne (*) et que je n'ai aucune envie de me farcir l'avis d'un dirigeant politique, bricolé à partir "de stats et [...] de la presse allemande qu'on m'a donné à lire" [à 5:18]. - De plus, Jean-Luc Mélenchon propose sur son blog une rubrique intitulée Dix ans de contributions sur l’Allemagne   (2005/2015) où je ne trouve aucune mention de la victoire de Bodo Ramelow (Die Linke) en Thuringe (fin 2014) ni de l'instauration d'un salaire minimum depuis le 1er janvier 2015 (grâce au SPD) ou encore des mouvements de grève actuels et du travail des syndicats. - Je lis au contraire pour l'année en cours [loc. cit.] : 

    5 janvier 2015 : Tenir tête à madame Merkel ne comporte qu’un risque : pour les Allemands – Extrait de note de blog
    26 janvier 2015 : Dette : l’Allemagne doit payer – Extrait de note de blog
    20 février 2015 : Le gouvernement allemand est le problème posé à l’Europe – Extrait de note de blog
    25 février 2015 : Le problème en Europe, c’est l’Allemagne de Merkel – Note de blog
    20 mars 2015 : Le gouvernement allemand répand le poison de l’austérité – Interview RMC-BFMTV
    30 mars 2015 : Dire stop à l’Allemagne – Communiqué
    31 mars 2015 : Madame Merkel est en train de faire une Europe allemande – Vidéo RTL
    4 avril 2015 : Obscène germanolâtrie – Extrait de note de blog
    4 avril 2015 : La Grèce étranglée par l’Allemagne – Extrait de note de blog
    11 avril 2015 : Les sanctions anti-Russes sont illégales – Extrait de note de blog
    13 avril 2015 : Une députée allemande Die Linke démonte la politique de Merkel – Vidéo de la Télé de Gauche
    17 avril 2015 : L’odieux Schäuble doit demander pardon aux Français – Communiqué
    24 avril 2015 : Espionnage : l’Allemagne complice de la NSA – Communiqué
    30 avril 2015 : Un pamphlet contre la légende du prétendu « modèle allemand » – Extrait de note de blog
    30 avril 2015 : Oreilles allemandes jusqu’à l’Élysée : Merkel doit s’excuser – Communiqué


Face à ces formules choc, M. Mélenchon entend rassurer sur le poids de son livre [à 6:35] : "C'est pas un livre de fumiste, je voudrais pas que l'on croie que c'est pas du boulot, ça [il agite son bouquin], c'est des dizaines d'heures de travail... - Des dizaines d'heures de travail, rien que ça ! - Et d'enfoncer le clou de la prévention [à 9:55] : "Mais je voudrais pas qu'on croie que c'est un livre anti-allemand, moi je suis pas anti-allemand." - Pas besoin d'avoir lu La dénégation de Freud (1925) pour capter ces deux messages !

Si j'ai bien compris, la thèse centrale du bouquin, c'est que le "système allemand" ne marche pas [à 11:10]. Or, connaissant bien les deux pays et les deux idiomes, je sais que les systèmes sociaux allemand et français, en gros, se valent : des deux côtés du Rhin il y a le RSA (ou Hartz 4), la sécu pour tous, les allocations logement. En Allemagne, on touche en outre (Rhin) une "prime" de 184€ par mois pour chaque enfant (jusqu'à sa majorité) et l'État social est inscrit dans la Constitution, ce que ni Mme Merkel ni aucun autre dirigeant ne peut changer.

On frise le ridicule lorsque le politicien aborde le rôle de la femme en Allemagne en citant les "trois K" : Kinder, Küche, Kirche (Enfants, Cuisine, Église). Il s'agit d'un "archaïsme" remontant à Guillaume II [wikipedia en], dont on se moque de nos jours avec la formule Kinder, Küche, Karriere. Mais pourquoi M. Mélenchon déterre-t-il cette relique patriarcale [à 13.45] tout en concédant - heureusement - qu'elle n'a plus cours aujourd'hui ? 

jeudi 11 décembre 2014

Je veux garder mon Allemagne de Mme Merkel


Jean-Luc Mélenchon, photo : dpa, choisie par Bild (lien ci-dessous)


« Maul zu, Frau Merkel ! Frankreich ist frei ». - Dans un allemand correct, mais un peu vieillot et rudimentaire, Jean-Luc Mélenchon interpelle la chancelière qui vient à nouveau d'être plébiscitée à la tête de son parti, la Christlich-Demokratische Union (CDU). - Et le politicien démissionnaire du Parti de gauche d'ajouter : « Occupez-vous de vos pauvres et de vos équipements en ruines ! »


Si le quotidien Les Échos considère que « La presse allemande en ligne reprend largement le message de l’homme politique de gauche qui a appelé la Chancelière allemande à "la fermer" vis-à-vis de la France », l'impact sur l'opinion d'outre-Rhin n'est guère plus important que la récente élection d'un ministre-président du Parti de gauche en Thuringe l'est en France. Il est étonnant, par exemple, que l'hebdomadaire du centre gauche Der Spiegel reprend pratiquement le même texte que le quotidien populiste Bild : on en conclut qu'il s'agit de la même dépêche d'agence (isa/AFP) que les rédacteurs de ces deux publications aux antipodes n'ont pas pris la peine de développer.


dimanche 1 avril 2012

Mélenchon - Hollande : L'état de la Gauche

Sur son blog, Jean-Luc Mélenchon écrit samedi, 31 mars 2012, à l'entrée Face à l’artillerie lourde (caractères gras ajoutés) :
Vous avez noté, bien-sûr, comment depuis quelques semaines, les intentions de vote pour le Front de Gauche relevées par les sondages sont à la hausse. Cette fois-ci cela correspond à ce que nous observons de toute part dans le pays avec nos propres instruments de mesure. La marche sur la Bastille et sa première réplique à Lille en attestent. Je n’en dis pas davantage. Cette situation déchaîne contre moi un ouragan de tirs tendus. Les arquebusiers les plus divers du Front National aux Verts en passant bien-sûr par les socialistes et l’UMP sont montés au feu. Je vois bien que cela énerve ! J’en dis le fond des raisons.
Après des développements sur le malaise dans les lycées professionnels et un paragraphe sur l'association pour le "droit de mourir dans la dignité", le politicien semble en venir à ce fond :
Inutile, je suppose, de dire de nouveau combien le traitement médiatique de la campagne dans la presse écrite peut être décevant. Je parle de la presse écrite car c’est d’elle dont on attend recul et arguments par rapport à l’instantané du média audiovisuel. En réalité, à l’heure actuelle, l’audiovisuel est beaucoup plus factuel qu’une bonne partie de l’écrit. Je n’en juge pas en général mais au cas particulier qui me concerne. Pour l’humour de situation je veux souligner un événement d’un genre nouveau. Il s’agit du traitement du meeting de Lille. A peine avions nous donné le chiffre de la participation que la journaliste du Figaro « tweetait » de tous côtés des persiflages. Du journalisme pro actif en quelque sorte ! Aussitôt les deux autres faces de l’Everest médiatique parisien firent écho. Car la confraternité est plus importante que les faits. C’est donc une première qui a eu lieu. Elle ridiculise les fabricants de faits. Car cette fois-ci la police a… compté. Il y a donc trois chiffres. Celui des organisateurs : 23.000. Celui de la police, reproduit par toute la presse locale : 20.000. Et le chiffre du journal « Le Monde » : 10.000 ! Ah les braves gens. Et, bien sûr, objectivité oblige, le « reportage » avance le chiffre des « organisateurs » pour mieux souligner l’absurde exagération. Manque de chance pour ce type de manipulation, le chiffre de la police (un ramassis de bolcheviks à la solde du Front de Gauche ?) souligne au contraire que nous n’exagérons pas. Mais cet amusant ridicule nous instruit. Il nous rappelle combien le nombre des participants est un enjeu politique. Je ne parle pas de ce qu’en dit la presse parisienne. Cela n’a pas d’impact sur notre trajectoire comme on le voit à notre succès après qu’elle a tant fait pour nous nuire ! Je parle de la perception qu’en ont ceux qui en reçoivent le choc. Car il s’agit d’un choc. Le sentiment de la force décuple la force. La perception du rapport de force fait partie du rapport de force. Et c’est bien pourquoi on reconnaît nos ennemis à cette crispation qui les conduit à nier les faits jusqu’au ridicule !
Un peu plus bas, l'intention d'y venir est clairement annoncée :
Car le fond de l’affaire est le suivant. Tant que Le Pen est troisième, la chanson du vote utile peut être passée en boucle. L’univers politique des quinze dernières années continue à ronronner avec ses rentes de situation et ses positionnements convenus ! Dès qu’elle n’y est plus, le verrouillage des deux premières places saute. Et les suivants de la file sont mis au pied du mur tout aussi fortement ! Dans cette manœuvre, la première bénéficiaire, madame Le Pen, prend toute sa place et vocifère avec le reste de la meute. Et alors apparaît l’incroyable. Il est frappant de constater que les arguments de madame Le Pen et de nombre de mes détracteurs sont les mêmes. Notamment lorsqu’ils utilisent le registre grossier d’un anticommunisme nostalgique de la guerre froide. Chavez, Cuba, le Dalaï Lama sont ainsi régulièrement convoqués à la barre des témoins de mes turpitudes, sans oublier Pierre Lambert et mes trois ans de trotskisme actif il y a quarante ans de cela ! Cécile Duflot y ajoute de touchante remarque sur mon âge avec les mots de l’élégance qui la caractérise.
Pour ceux qui resteraient sur leur faim, le politicien mène ensuite une attaque frontale contre le Parti Socialiste et son candidat François Hollande, après s'être étonné que sa montée dans les sondages ne s'accompagne jamais d'une baisse de son rival à gauche, ce qu'il interprète comme une "propagande manœuvrière" :
Au PS c’est la confusion face à ma candidature. Car notre percée effondre le beau plan stratégique de départ. Que faire, se demande-t-on dans le bureau du tout puissant Manuel Valls qui dirige tout ? Car pour celui-là, nous sommes un danger. Du coup, depuis quarante-huit heures, faute d’idées ou de programme à défendre c’est une suite ininterrompue d’agressions pleine de postures pontifiantes qui se succèdent. Plusieurs caciques me conseillent de « réserver les coups à Sarkozy ». Mais eux-mêmes font exactement le contraire avec moi dans des termes d’une violence incroyable. A vrai dire, pire que cela ne fut jamais aux heures les plus difficiles à gauche au cours des vingt dernières années. D’où vient cette perte de sang froid ? En voici la raison. Hollande ne peut rompre l’ambivalence de sa stratégie politique. Il comptait que nous serions quantité négligeable, obligés de voter sans discuter.
Or, comme le précise Jean-Luc Mélenchon un peu plus bas, contrairement à ce qui a été affirmé par Jérôme Cahuzac sur Public Sénat (le 27 mars) :  "il n'y a aucune négociation et aucun accord ni avec Hollande ni avec le Parti Socialiste. Cahuzac ment donc avec aplomb". Suivent des polémiques contre - ou lancées par - trois autres responsables socialistes, Gérard Collomb, Michel Sapin et "notre cher Arnaud Montebourg".

COMMENTAIRE

Les écrits restent. Avec Internet, on peut ajouter : les paroles aussi. Il est maintenant possible de déterrer tout et n'importe quoi pour faire argument. Y compris l'entrée du blog, qui vient d'être citée, quand son auteur l'aura déjà oubliée. Ou même effacée. - Dans ce contexte, certains ignorent peut-être encore - ou bien oublient un peu vite - que Jean-Luc Mélenchon a mené une carrière de trente ans au Parti Socialiste [wiki] :
Militant socialiste à partir de 1977, il est successivement élu conseiller municipal de Massy (1983), conseiller général de l'Essonne (1985) puis sénateur du même département en 1986, 1995 et 2004, enfin député européen en 2009 dans la circonscription Sud-Ouest. Il est ministre de l'Enseignement professionnel de 2000 à 2002, dans le gouvernement de cohabitation de Lionel Jospin. - Il fait partie de l'aile gauche du Parti socialiste jusqu'au congrès de Reims, en novembre 2008, date à laquelle il quitte ce parti pour fonder le Parti de gauche (PG).
Il n'y a pas à commenter ici la structure et le style de cet article : contrairement à beaucoup d'autres, Jean-Luc Mélenchon écrit lui même son blog, les articles sont souvent longs et les sujets présentés pêle-mêle, comme ils viennent à l'esprit dans cette écriture à chaud qui a, comme la plupart des autres productions du genre, un évident caractère polémique. On le comprend.  Car le politicien est en plein combat, et ce depuis un certain temps déjà - sa candidature ayant été annoncée en janvier 2011 - avant que sa campagne ne devienne cette réussite populaire qu'elle est certainement.

Or, au cours de ces élections - insistons sur le pluriel -, le premier tour des présidentielles sera suivi, non seulement d'un second, mais de législatives, où le Front de Gauche, pour avoir des députés, doit compter sur les désistements des candidats du PS.

Jean-Luc Mélenchon (né en 1951) était jeune militant socialiste en mai 1981, quand la victoire du Programme Commun respirait par moments l'espérance de mai 1968. - La France est décidément un pays de révolutionnaires romantiques, ce qui n'a rien de déshonorant. Mais il se trouve que le même romantisme des révolutionnaires allemands a pu, non seulement contribuer à la victoire du totalitarisme par absence d'accords électoraux, en novembre 1932, entre les sociaux-démocrates du SPD et les communistes révolutionnaires du KPD, mais encore conduire à d'étranges "grandes coalitions" gouvernementales entre SPD et la droite chrétienne-démocrate de la CDU, faute d'entente fédérale entre le SPD et Die Linke ("La Gauche"), l'équivalent du Front de Gauche en Allemagne. Toutefois, quelques alliances régionales couronnées de succès et la victoire commune à la mairie (au Sénat) de Berlin et dans le Brandebourg ont pu faire grande impression sur notre auteur, si je me souviens bien de son voyage dans la capitale allemande, relaté en termes dithyrambiques sur son blog. Or, depuis les élections de novembre 2011, cette alliance a vécu, et la ville est désormais régie par une ("grande") coalition CDU-SPD.

Alors, pour donner du poids à la "gauche de la gauche", son nouveau leader, s'il n'est pas présent au second tour, devrait appeler à voter Hollande et passer des accords avec les sociaux-démocrates dans la foulée. Car, en cas de réélection de l'actuel Président, les législatives, un mois plus tard, seront sans doute remportées encore une fois par la "majorité présidentielle", d'autant que la poursuite probable des polémiques à gauche, où chacun mettra la défaite présidentielle sur le compte de l'autre, desservira à la fois les candidats du Front de Gauche et du PS.

 En effet, avec le régime présidentiel en vigueur de ce côté du Rhin, la gauche ne peut même pas espérer une grande coalition. Mais en cas de victoire sur le fil du rasoir, l'actuel Président nommera très certainement un nouveau "gouvernement d'ouverture".