Avec leurs deux derniers articles les forcenés de la Livre Sterling et un hebdomadaire allemand présumé centre gauche partagent la même ligne éditoriale : en somme, il faudrait dégraisser de plus en plus l’État social, qu'il soit d'ailleurs français, allemand ou britannique ; or le candidat social-démocrate François Hollande se refuserait apparemment à appliquer ce régime amincissant, tendance anorexique, prescrit par les rois de la finance. What a shame !
Mais ce n'est pas tant l'article de The Economist qui surprend puisque l'hebdomadaire britannique reste fidèle à lui-même en lançant sa formule d'un Monsieur Hollande plutôt dangereux. C'est le Spiegel qui déçoit ses lecteurs traditionnels en affichant - du moins dans le papier sur la politique européenne proposée par le candidat social-démocrate français - une nette préférence pour le régime amincissant que Mme Merkel impose aux travailleurs, chômeurs et retraités allemands. Or, puisque celle-ci doit se représenter dès septembre 2013 devant l'électorat allemand et que sa formation chrétienne-démocrate, la CDU, n'est absolument pas certaine de pouvoir créer une nouvelle majorité au Bundestag, on se demande si le Spiegel apporte dès à présent son soutien à la chancelière sortante, au risque de faire se retourner dans sa tombe le fondateur de l'hebdomadaire d'information, Rudolf Augstein. Was für eine Blamage !
L'austérité, la rigueur, voilà les médicaments qui soigneraient la maladie de la dette contractée par l’État social à force de pourvoir aux soins équitables pour tous les citoyens, à leur éducation, aux logements sociaux, services publics, transports en commun etc. etc.
Mais qu'en est-il de l'autre dette ? Celle dont personne ne parle jamais comme d'une faute grave, extrêmement ruineuse pour l'ensemble de l'humanité, comme d'une dette qu'il faudrait commencer à rembourser : la désertification de la nature et la destruction des espèces vivantes, la pollution des villes et des océans, la misère de tous ces peuples qui végètent sous le seuil de pauvreté dans l'étau d'un marché mondial inéquitable et implacable ?
L'autre jour, j'ai vu une émission sur un entrepreneur satisfait d'avoir délocalisé ses activités dans une région où les habitants travaillent pour une bouchée de pain, dont il peut en outre épuiser sans vergogne les ressources naturelles. Le plus étonnant : il n'éprouvait aucune espèce de culpabilité, pas le plus petit sentiment de faute, pas la moindre compassion pour le sort misérable de ses semblables. Ses arguments : mondialisation, rendement. The usual rationalization.
Pour changer, une alliance des sociaux-démocrates français et allemands, avec le soutien des écologistes et des mouvements citoyens, ne pourrait-elle pas contribuer à façonner le destin politique d'une Europe prise dans le carcan néo-libéral ? N'est-ce pas cela qu'il s'agit d'empêcher à tout prix, à coups de rationalisations et de moralisations économistes de personnes qui n'ont par ailleurs aucun scrupule à affamer les populations, à désertifier le monde et à alimenter les guerres entre les peuples avec leur "superproduction" d'armements ? Si les agences de notation ont la "décence" de ne pas lancer une nouvelle attaque contre la France en pleine campagne électorale - mais il leur reste encore une semaine pour affirmer une prise de pouvoir totalement antidémocratique et surtout antisociale -, la "dégradation" de l'Espagne est tout-de-même une déclaration d'intention - sinon de guerre contre l’État social - on ne peut plus claire. Dès lors, n'y-a-t-il donc aucun moyen - démocratique - de faire valoir une autre perspective que celle de ces "sujets supposés savoir" qui nous conduisent sans cesse au bord du gouffre ?
Et si la soupe à la grimace, pour une fois, changeait de camp ?
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