"Identité
Nationale"
(dimanche 11 mars 2007)
(dimanche 11 mars 2007)
Après
le soutien de M. Glucksmann à Nicolas Sarkozy (voir ci-dessus), Mme
Simone Veil vient d’y ajouter le sien, deux jours à peine avant
l’annonce de la création, "si je suis président", comme
se plaît à dire le candidat de l’UMP, d’un ministère "de
l’Immigration et de l’Identité nationale". Ainsi, les
"fautes à pas de chance" s’accumulent, à commencer par
le soutien du chanteur populaire Johnny qui, peu de temps après,
s’évade en Suisse et voudrait à nouveau prendre la nationalité
belge pour des raisons ouvertement fiscales. C’est ensuite
l’animateur Pascal Sevran, escaladeur convaincu de la roche de
Solutré aux côtés de son ami feu le président Mitterrand, qui
vient soutenir le candidat Sarkozy pour se faire remarquer par
quelques tirades particulièrement indécentes sur l’Afrique, qui
révèlent avec une inculture fondamentale un mépris indéniable
pour les peuples condamnés à la misère. Une vidéo
(doc-gyneco-pete-les-plombs) montre un autre soutien de M.
Sarkozy en train de "partir en live" dans un élan de
vulgarité sans nom, peut-être convaincu que son ami ministre de
l’Intérieur restera à ce poste pour l’éternité afin de
permettre au chanteur Doc Gynéco de tenir le genre de discours
mafieux que l’on profère quand on pense faire partie de la bande
dominante et que le caïd viendra bientôt soumettre tous les
récalcitrants: un discours du genre "racaille". Si M.
Sarkozy avait déjà misé sur le "mauvais cheval" en 1995
avec son soutien à Edouard Balladur, la malchance semble ne pas
vouloir lâcher prise. A cela s’ajoute le goût prononcé de
l’intéressé pour l’effet d’annonce et "la formule qui
tue", de sorte qu’aujourd’hui beaucoup de libéraux se
détournent de lui, simplement par peur d’un ego surdimensionné
toujours à l’affût de reconnaissance et prêt à tout pour rester
au pouvoir. On finit alors par lui préférer M. Bayrou, dont la
nature plus effacée semble plus propice à la bonne marche des
affaires, qu’un vrai libéral devrait placer au-dessus de tout. -
Et puis voilà que, fort du soutien de Mme Veil, ancienne déportée
dans l’univers concentrationnaire, ministre sous le président
Giscard d’Estaing (UDF), à l’origine de la loi qui légalisa
l’avortement en France, M. Sarkozy "craque", sans doute
sous la pression des sondages qui apportent un crédit phénoménal à
la candidature de François Bayrou, certainement son concurrent le
plus direct, pour venir "chasser sur le territoire du Front
National", comme ne manque pas de titrer la presse. Et
Jean-Marie Le Pen ne se prive pas, pour une fois, d’abonder dans le
sens des médias. Mme Veil doit être franchement catastrophée de
voir le candidat, à qui elle vient tout juste d’apporter une
caution pour le moins "antifasciste", se laisser aller à
de tels excès. Or, en politique, les chemins sont sans retour. M.
Sarkozy ne pourra pas faire marche arrière. Et Mme Veil non plus.
Car ce ne serait pas sérieux. Puisqu’on se situe actuellement sur
le seul terrain virtuel des effets d’annonce, dont l’électorat
pense à juste titre qu’il n’a aucun rapport avec la politique
qui sera effectivement menée après l’élection, tout recul ferait
immédiatement apparaître la supercherie de cette bataille des
formules et des programmes. Cependant, Mme Veil pourrait simplement
prendre ses distances, pour des raisons, disons,
"’personnelles"...
Devant le tollé général, M. Sarkozy trouvera sans doute un moyen de désamorcer l’annonce explosive d’un "ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale". Mais la tache s’annonce difficile. Cette tendance à l’excès s’était déjà manifestée avec sa formule suspecte du "travail c’est la liberté", prononcée lors de son discours d’investiture (voir ci-dessus, "Arbeit macht frei"), ou encore avec le manichéen "la France, on l’aime ou on la quitte" et, bien sûr, avec le fameux mot de "racaille", qu’il aura ensuite fallu nuancer pour éviter un début de guerre civile dans les banlieues. M. Bayrou n’est pas le seul à noter que cette dernière association en date entre les expressions "immigration" et "identité nationale" visant à définir le cadre d’un nouveau ministère et d’une politique autoritaire semble pour le moins douteuse. Venant d’un enfant d’immigrés hongrois et grecs, dont le père s’était enfui aux États-Unis, cette insistance sur la notion d’identité nationale est révélatrice, d’autant que le discours d’investiture du candidat l’avait fondée sur "deux mille ans de chrétienté" (sic) alors que la France actuelle se distingue surtout par la "rupture" avec l’État traditionnel et ses "autorités théologico-politiques", mise en œuvre par la Révolution Française et la promulgation des Droits de l’Homme. Mais ce qui est plus grave encore pour M. Sarkozy que la "dérive autoritaire" (ou totalitaire) qui lui est reprochée, c’est sa personnalité qui se manifeste plus clairement jour après jour, annonce après annonce et qui, aux yeux d’une partie croissante de l’opinion publique, paraît de moins en moins compatible avec la fonction de président de la République Française, dont on est en droit d’attendre une attitude réfléchie, quelque circonspection et un brin de sérénité...
Devant le tollé général, M. Sarkozy trouvera sans doute un moyen de désamorcer l’annonce explosive d’un "ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale". Mais la tache s’annonce difficile. Cette tendance à l’excès s’était déjà manifestée avec sa formule suspecte du "travail c’est la liberté", prononcée lors de son discours d’investiture (voir ci-dessus, "Arbeit macht frei"), ou encore avec le manichéen "la France, on l’aime ou on la quitte" et, bien sûr, avec le fameux mot de "racaille", qu’il aura ensuite fallu nuancer pour éviter un début de guerre civile dans les banlieues. M. Bayrou n’est pas le seul à noter que cette dernière association en date entre les expressions "immigration" et "identité nationale" visant à définir le cadre d’un nouveau ministère et d’une politique autoritaire semble pour le moins douteuse. Venant d’un enfant d’immigrés hongrois et grecs, dont le père s’était enfui aux États-Unis, cette insistance sur la notion d’identité nationale est révélatrice, d’autant que le discours d’investiture du candidat l’avait fondée sur "deux mille ans de chrétienté" (sic) alors que la France actuelle se distingue surtout par la "rupture" avec l’État traditionnel et ses "autorités théologico-politiques", mise en œuvre par la Révolution Française et la promulgation des Droits de l’Homme. Mais ce qui est plus grave encore pour M. Sarkozy que la "dérive autoritaire" (ou totalitaire) qui lui est reprochée, c’est sa personnalité qui se manifeste plus clairement jour après jour, annonce après annonce et qui, aux yeux d’une partie croissante de l’opinion publique, paraît de moins en moins compatible avec la fonction de président de la République Française, dont on est en droit d’attendre une attitude réfléchie, quelque circonspection et un brin de sérénité...
"Chirac plombe Sarkozy... tout naturellement"
(dimanche 25 mars 2007)
Le
soutien du président Chirac à son ministre Sarkozy, accordé "tout
naturellement" ce mardi 20 mars 2007, a été amplement
commenté par la presse. Quelques jours plus tôt, ses "adieux
télévisés" n’avaient pas fourni d’indice sur l’option
qu’il allait prendre : les commentateurs avaient prévu que le
caractère "solennel" de cette communication
présidentielle, présumée ultime, n’autorisait aucune prise de
position, par définition "partisane"; avec sa déclaration
d’amour pour les Français et la France, émouvante pour les uns,
pathétique pour les autres, le président Chirac avait surtout
formulé des mises en garde, contre la tentation et la dérive
extrémistes par exemple, qui pointeraient leur nez dans l’annonce
faite le 8 mars par le candidat Sarkozy d’un "ministère de
l’Immigration et de l’identité nationale" (voir
ci-dessus), pour insister ensuite sur ses choix de politique
étrangère, passant sous silence ses débuts catastrophiques à
l’Elysée en 1995 avec sa reprise des essais nucléaires dans le
Pacifique Sud, qui lui avaient valu les foudres de l’opinion
internationale, et souligner sa résistance contre la politique
agressive de l’administration Bush en Irak (mars 2003).
Mais
que faut-il donc penser du soutien que le futur ex-président
français accorde au candidat choisi par les militants de l’UMP,
parti qu’il avait lui-même fondé en 2002 pour asseoir sa
(prodigieuse) majorité au second tour (82%) ? - Récemment, on a vu
l’humoriste politique Dieudonné apporter, contre toute attente,
son soutien à l’altermondialiste José Bové (le 15 janvier) qui,
un jour plus tard, réplique: "Je n’en veux pas. Je suis en
total désaccord avec les prises de position et les initiatives
récentes de Dieudonné. C’est une manœuvre médiatique"
(dans le Parisien Libéré du 16/01/07).
Pour
M. Sarkozy, certains soutiens "people" ont également eu
de fâcheuses conséquences (voir ci-dessus). Mais on le voit mal
prendre ses distances avec ce "soutien suprême" qui rend
pourtant plus difficile (ou moins crédible) son discours de
"rupture". Car cette affaire-là marche dans les deux sens
: si tu acceptes mon soutien, tu ne peux plus me désavouer...
Une
autre option du Président de la République était de soutenir
François Bayrou, sans doute plus proche de ses idées. Or, comme le
candidat centriste n’a aucune chance d’être élu s’il ne
maintient pas son projet de "rupture radicale" avec la
droite et la gauche "traditionnelles", un tel soutien ne
lui aurait pas rendu service, ce que le Président n’est pas sans
ignorer, comme il sait certainement que tout soutien qu’il peut
aujourd’hui formuler prend la forme d’un couteau à deux lames
ou, si l’on préfère, d’un cadeau empoisonné.
Enfin,
le président Chirac aurait pu s’abstenir de tout soutien car il
prend, malgré tout, un gros risque en misant sur un perdant
potentiel, puisque le candidat Sarkozy peut être battu au second
tour par M. Bayrou qui, de son côté, n’est pas assuré de passer
le premier. Mais cet "abstentionnisme" eût été contre
la "nature" de l’animal politique Chirac...
Si,
comme beaucoup de commentateurs s’accordent à le penser sans
toujours le dire, le soutien officiel (et un peu trop formel pour
être crédible) de M. Chirac au candidat choisi par sa "famille
politique" constitue l’une des dernières "manœuvres
politiques" du président, il faudrait sérieusement se
demander en quoi elle consiste, tout en sachant qu’il n’aura pas
toujours eu la main heureuse sur ce terrain-là (comme avec sa
fameuse "dissolution" de 1997). - Et il faut dire qu’avec
ce soutien au ministre Sarkozy, le président Chirac annonce
également, avant tout le reste, qu’il accepte sa démission pour
le lundi 26 mars, ce qui veut dire que, désormais, certains
pourraient impunément faire feu de tout bois sur le simple citoyen
Nicolas Sarkozy, cependant que le futur ex-président français
continue de tirer encore un peu les ficelles à l’Élysée avant
de prendre une retraite politique "méritée" (car "il
y a une vie après la politique") pour peut-être
s’asseoir au bord de l’eau et voir passer les proverbiales
dépouilles de ses ennemis les plus intimes...
Soutenance
(vendredi 6 avril 2007)
Nicolas
Sarkozy a l’avantage d’être soutenu par l’ensemble du
gouvernement sortant, président de la République et première dame
de France compris. Aux yeux de beaucoup de citoyens, il en procède
une "crédibilité " qui tient du prestige que l’on
associe à l’exercice du pouvoir dans les plus hautes sphères de
l’État. Mais cet avantage comporte aussi un inconvénient lié aux
échecs de l’équipe sortante, qui risque de faire l’objet de
l’un de ces "votes sanction" dont l’électorat français
a le secret (2002, 2005). Il s’agit dès lors de savoir si
les arguments pragmatiques et les bonnes paroles de l’équipe au
pouvoir visant à justifier un bilan difficile contrebalanceront une
sanction électorale prévisible. Or, en considérant les soutiens du
candidat Sarkozy, on se demandera surtout si les promesses de
"changement" et le fameux argument de "rupture"
ont encore un sens.
Ajout
(mai 2007) : Pour le premier point traité ci-dessus (le soutien
de J. Chirac à N. Sarkozy), l’affaire n’est pas finie. Car même
avec la victoire "annoncée" aux Législatives, il faut
encore que le nouveau président Sarkozy puisse venir à bout des
forces politiques "extra-parlementaires" qui risquent de se
manifester avec violence au cours du quinquennat à venir si
certaines mesures autoritaires annoncées se heurtent, comme c’est
prévisible, à la "grogne" populaire. Dans cette
perspective, l’exercice autoritaire du pouvoir risque de laminer
Nicolas Sarkozy. - Le second point (le "vote sanction") ne
s’est pas confirmé. A droite, on dit que l’erreur de la gauche a
été d’y appeler avec trop d’insistance. Mais, une fois encore,
ce vote pourrait intervenir plus tard et les "voix"
pourraient également se faire entendre d’une tout autre manière...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire